N’ayez pas peur de la coloscopie, c’est très sûr et indolore

Un million de coloscopies sont passées chaque année en France ! Cet examen sous anesthésie générale permet notamment de repérer des cancers du côlon et du rectum et de retirer des polypes pré-cancéreux. Le docteur Patrick Delasalle est hépato-gastroentérologue à la clinique de Grasse et secrétaire du Centre régional de dépistage des cancers Sud-Paca et le Dr Eric François est oncologue digestif au centre Antoine-Lacassagne à Nice. Ils détaillent les progrès fantastiques des traitements et rencontreront le public lors d'une conférence jeudi 6 avril à 18h à Nice.

Santé

Dans la lutte contre le cancer colorectal, à quel moment est décidé le recours à l’endoscopie, et en quoi consiste-t-il généralement ?
Docteur Patrick Delasalle et docteur Eric François : La coloscopie est effectuée en cas d’antécédents familiaux coliques ou en cas de colite inflammatoire (MICI) ou en cas de symptômes. Sinon, la coloscopie sera effectuée si le test FIT (Test Immunologique Fécal) est positif. La coloscopie est un examen fréquent (plus d’un million de coloscopies par an en France) sans douleurs du fait d’une anesthésie générale simple, en ambulatoire le plus souvent.

La solution à boire la veille reste une… purge !

On peut avoir l’impression que « passer une coloscopie » est une formalité, certes peu agréable, mais sans risque. Est-ce le cas ?
Le principal désagrément pour les patients est la prise de la préparation colique afin d’avoir un intestin propre pour un examen de bonne qualité. Les progrès des préparations coliques avec moins de volume à boire et les progrès techniques rendent la coloscopie moins désagréable, avec plus de sécurité. Les principaux risques sont les risques de l’anesthésie, d’où la nécessité d’un jeûne avant l’examen de 6 heures pour les solides et de deux heures pour les liquides clairs.

La perforation du côlon est redoutée par les patients. Elle est devenue très rare lors des examens diagnostics et on a les moyens de refermer les brèches lors de l’examen.

On peut retirer tous les polypes. Ou presque…

Quel est le « candidat idéal » à la coloscopie, et faut-il généralement redouter un résultat positif ?
Toute la population peut être candidate à une coloscopie, même avant 50 ans en cas de symptômes ou de risques génétiques. Les contre-indications à la coloscopie sont rares, souvent en rapport avec une contre-indication anesthésique. Le test FIT de dépistage est positif dans 4% des cas, plus fréquemment chez les hommes âgés

Quels sont les principaux progrès réalisés en matière d’endoscopie interventionnelle ? Quels sont les gains pour le patient ?
Tous les polypes peuvent être retirés lors d’une endoscopie. Un polype avec un risque important d’envahissement en profondeur ne sera pas retiré en endoscopie mais nécessitera le recours à la chirurgie. La dissection sous muqueuse (DSM) est une technique effectuée par des gastroentérologues spécialisés. C’est cette technique qui permet la résection de tous les polypes avec la possibilité d’une analyse détaillée du polype par le laboratoire d’anatomopathologie au microscope.

Les cancers colorectaux séparés en sous-groupes

A-t-elle notamment permis de limiter le recours à la chirurgie et ses conséquences plus délabrantes ?
Les cancers superficiels retirés lors d’une coloscopie ne nécessitent pas de résection chirurgicale. C’est seulement après l’examen du polype par le laboratoire d’anatomopathologie que l’on peut confirmer l’absence de chirurgie ou non. Avant ces nouvelles techniques de résection, les gros polypes ou des petits cancers nécessitaient un geste chirurgical.

Venons-en aux traitements médicaux. On est un peu perdus entre les chimiothérapies, les thérapies ciblées et l’immunothérapie. Sur quelles bases privilégiez-vous un traitement plutôt qu’un autre ?
Les progrès scientifiques ont permis de « séparer » les cancers colorectaux en différents sous-groupes
moléculaires, anatomiques, biologiques, etc. Si beaucoup de travail reste à faire et si les résultats des études modulent en permanence nos décisions, ces éléments facilitent la décision (ainsi que les discussions dans le cadre de réunions multidisciplinaires).

Les effets secondaires de la chimiothérapie

La chimiothérapie fait souvent peur, elle est encore vue comme un traitement massif, peu ciblé, brutal, épuisant pour le patient. Qu’en est-il réellement ?
Comme souvent, la réalité est plus complexe. Si la chimiothérapie n’est pas dénuée d’effets secondaires, ceux-ci sont dans la très grande majorité des cas limités et transitoires. De plus certaines thérapies ciblées (qui ne sont pas des chimiothérapies) sont parfois bien plus contraignantes et toxiques que les chimiothérapies. Tout est une question de balance bénéfice/risque et d’habitude de gestion de ces traitements.

« Un scandale médical et social »

En matière de lutte contre le cancer, on évoque de plus en plus des thérapies « individualisées ». De quoi s’agit-il ? Les résultats sont-ils bien meilleurs ?
On personnalise de plus en plus les traitements pour chaque patient à partir du profil moléculaire, mais pas que. Un exemple caricatural est celui de l’immunothérapie pour les cancers colorectaux MSI qui représentent 5% des patients (en fait probablement 15% des cancers du côlon droit et moins de 3% pour le rectum) ; ces traitements peuvent guérir des patients métastatiques qui sans cela seraient morts à cause de leur cancer. Toutes les équipes peuvent citer plusieurs cas de disparition tumorale « miraculeuse » mais dont seule l’action thérapeutique est à l’origine du résultat. On peut regretter que malgré ces résultats extraordinaires, nos autorités de santé estiment qu’il n’est pas utile de prendre en charge financièrement des thérapeutiques. Ce qui est un vrai scandale médical et social.

De gros progrès attendus dans les 10 ans à venir

Quel est le pourcentage de patients concernés par des solutions aussi pointues ? Deviendront-elles, dans un futur proche, la norme pour la majorité des patients ?
De 5 à 15% en fonction des cibles et du développement de nouvelles solutions.

Quels pourraient être les progrès thérapeutiques contre le cancer colorectal dans la décennie à venir ?
Ils sont multiples : nouvelles immunothérapies, combinaisons d’immunothérapies, nouvelles chimiothérapies, nouvelles cibles HER2, RASm G12C, etc., l’utilisation de l’ADN tumoral circulant.

Conférence publique à Nice jeudi 6 avril

Conférence gratuite ouverte au public organisée par MProvence avec le Centre régional de dépistage des cancers et la Fédération francophone de cancérologie digestive : « Dépistage, prévention, progrès thérapeutiques : vaincre le cancer colorectal, c’est possible ! » Jeudi 6 avril à 18h au Centre Méditerranéen Universitaire, 65 Promenade des Anglais à Nice. Avec le Dr Patrick Delasalle (clinique de Grasse), le Dr Eric François (Centre Antoine-Lacassagne), le Dr Sylvia Benzaken (CHU L’Archet, Nice), Pr Patrick Baque (CHU L’Archet, doyen de la faculté de médecine de Nice), Pr Stéphane Schneider (CHU L’Archet), Pr Jean-François Seitz (CHU Timone, Marseille).

Inscription recommandée sur masanteprovence@gmail.com

Avec le soutien institutionnel des laboratoires Bayer, Merck, MSD et Servier.

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