Des morts comme s’il en pleuvait ! Les maladies qui dévastent notre coeur et nos artères tuent près de 150.000 Français par an et limitent la capacité à bien vivre de millions d’autres. Et pourtant… Et pourtant ! Les spécialistes estiment que 80% de ces infarctus, AVC, artériopathies en tous genres comme de nombreux cas de diabète ou d’hypercholestérolémie seraient évitables.
Si, si ! Vous avez bien lu : on pourrait les ranger au placard. Question : pourquoi ne le fait-on pas ? Réponse : par méconnaissance, imprudence, insouciance, habitude, malbouffe, tabagisme, alcoolisme… Des causes contre lesquelles, heureusement, on peut lutter. C’est ce qu’ont détaillé mercredi soir les soignants de l’Assistance Publique – Hôpitaux de Marseille, à l’occasion de la dernière conférence organisée par MProvence et consacrée à la prévention des maladies cardiovasculaires.
100.000 agressions par jour contre nos artères et notre cerveau !
Ainsi, le Dr François Silhol, cardiologue à la Timone, a frappé les esprits en rappelant le nombre de malades d’hypertension artérielle qui ne… prennent pas leur traitement ! Résultat : une incroyable agression contre leur cerveau, leur coeur et leurs artères quand on sait qu’on a 100.000 battements de coeur par jour. « Quand on donne un traitement aux patients, au bout d’un an la moitié d’entre eux ne le prennent plus ou le prennent mal. Or c’est 5 secondes par jour qu’il faut le matin pour prendre ses cachets et grâce à ces 5 secondes, vous allez éviter 100.000 agressions à vos artères. Sinon 100.000 fois par jour, tous les jours, votre cerveau est atteint, agressé. »
Parmi la centaine de personnes réunies dans l’amphithéâtre d’Aix-Marseille Université au Pharo, peu d’entre elles avaient imaginé le problème sous cet angle. Et le Dr Silhol d’enfoncer le clou : « 14 millions de Français sont atteints d’hypertension artérielle mais la moitié d’entre eux l’ignorent. Et sur les 7 millions qui le savent, seule la moitié est bien traitée et équilibrée. » Donc 11 millions de nos concitoyens vivent avec une épée de Damoclès au-dessus de la tête. Car l’hypertension est à l’origine de la plupart des atteintes cardiovasculaire et peut déclencher un AVC mortel.
« N’ayez pas peur des médicaments ! a alors lancé le Dr Bernard Vaisse. Ils ont permis d’augmenter le nombre d’années de vie en bonne santé. Ce sont des prolongateurs de vie ! »
Conseils pour surveiller sa tension
Selon le Dr Silhol, l’alcool et le sel figurent au rang des grands coupables. « Réduire leur consommation peut diminuer significativement l’hypertension. » Le Pr Jean-Claude Deharo, cardiologue, chef du service de rythmologie à l’APHM, insiste sur le fait de ne pas dépasser un verre de vin par jour, et de ne pas en consommer tous les jours.
Quels sont les symptômes de l’hypertension ? Des maux de tête, un essoufflement, une vision floue… mais la moitié des personnes atteintes ne ressent aucun symptômes. Dans ce cas, la seule solution consiste à prendre sa tension régulièrement à la maison. Elle ne doit jamais dépasser 14.9 et même plutôt pencher vers 13.8. Toutefois de nombreuses variantes, comme l’âge, entrent en ligne de compte et il n’y a pas un niveau idéal absolu.
Voici comment procéder selon le médecin : assis le dos collé à la chaise, le bras posé sur la table, musculairement détendu, sans avoir bu de café ou de thé, on prend sa tension au bras 3 fois d’affilée le matin au repos et on recommence en fin d’après-midi, ceci les 3 premiers jours de chaque mois. On note les résultats et on les amènera à son médecin traitant, qui adaptera le traitement si besoin.
Les jambes et le ventre
Le Dr Julien Bertolino, médecin vasculaire à la Timone, souligne par ailleurs que 2 millions de Français souffrent d’artériopathie des membres inférieurs. Les artères des jambes se rétrécissent. Mais, là encore, la moitié d’entre eux ne le savent pas. Après 70 ans, c’est même 1 personne sur 5 qui est atteinte. Cette vilaine circulation sanguine dans les jambes, souvent due à des artères obstruées, engendre un sur-risque de mortalité par infarctus ou AVC. Evidemment, une des solutions consiste à bouger, s’activer, marcher.
Le Dr Nicolas Prieur-Blanc, médecin du sport, incite fortement les personnes qui voudraient se remettre à l’activité physique à faire un check-up chez leur médecin. Au premier rang de l’assistance, une dame âgée questionne : « Je marche 6.000 pas par jour, c’est assez ? » C’est très bien ! Cette dame nous expliquera que c’est le podomètre intégré à son téléphone qui la stimule et lui donne la satisfaction des efforts accomplis, quand le soir elle constate avoir atteint son objectif. « Et c’est même sans compter les pas que je fais pour sortir le chien ! »
Le télétravail est notre ennemi
La Pr Sophie Béliard (endocrinologue à l’hôpital de la Conception) a mis en garde contre l’épidémie de diabète, que la France n’arrive pas à juguler. « Quand on a du diabète, la première cause de décès, ce sont les maladies cardiovasculaires. Or le nombre d’obèses à doublé en 20 ans. 1 Français sur 8 est obèse. Et un nouvel acteur de la sédentarité arrive, surtout depuis l’épidémie de Covid : le télétravail. On passe du lit au bureau, c’est catastrophique pour ces maladies métaboliques. »
Bon alors, quand faut-il s’inquiéter? Pour le Pr Deharo, c’est quand on note un changement dans nos habitudes. « Si vous constatez un essoufflement inhabituel en montant les escaliers, en marchant, une fatigue, c’est peut-être que votre coeur pompe moins bien, il faut consulter un cardiologue. »
Un risque multiplié par 30
La Pr Gabrielle Sarlon, médecin vasculaire à la Timone, a alerté les femmes présentes. Elles n’écoutent pas suffisamment les signaux d’alerte, encaissent trop de stress, une charge mentale trop lourde. Elle constate : « De plus en plus de femmes jeunes présentent ces maladies cardiovasculaires. »
Sophie Dolhadile, infirmière en pratique avancée spécialisée en cardiologie au CHU de Marseille, a présenté le cas d’un homme de 45 ans : la conjugaison de l’hypertension, du diabète, de l’hypercholestérolémie et du tabac multiplie par 30 le risque de faire un accident cardiovasculaire. « Les facteurs de risque ne s’additionnent pas, ils se multiplient. »
Le Dr Jean-François Renucci a détaillé le programme Pégase 2 conduit à la Timone qui permet un accompagnement tous azimuts des patients (une diététicienne, un psychologue, une assistante sociale…). Le succès est au rendez-vous, le risque a chuté de 10%.
La prévention pour tous
La prévention est donc efficace. C’est ce qu’a martelé lors de la conférence le directeur général de l’APHM, François Crémieux. « L’enjeu n’est pas de vivre le plus longtemps possible, mais avec la meilleure santé possible. Si on veut réduire un peu les inégalités en matière de santé, il faut qu’on soit plus mobilisés sur les facteurs de prévention. La prévention, ce doit être pour tout le monde, et notamment pour les personnes les plus éloignées du soin. »
Au terme de cette conférence bien garnie et fortement appréciée, Gabrielle Sarlon pouvait être fière du chemin parcouru en ces dernières heures de janvier. Grâce à la mobilisation de cette cheffe de service de la Timone, des milliers de personnes ont pu être informées et sensibilisées via des conférences et des productions médiatiques en ce début d’année 2024, et dans toute la région. Gageons que beaucoup auront pris la bonne résolution de prendre concrètement soin de leur coeur et de leurs artères. Maintenant, il faut tenir !
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