«Du gland à la truffe », tel est le crédo des pépinières Tenoux, qui produisent depuis 28 ans des plants truffiers au hameau de Bruis, à Valdoule (Hautes-Alpes).
En France, ils ne sont qu’une quinzaine à maîtriser la mycorhization des plants truffiers, dont deux dans les Hautes-Alpes, ce qui rend le département unique en son genre dans ce domaine. Sur le procédé employé par les pépinières, impossible de savoir quoi que ce soit. La culture du secret ne souffre ici aucune entorse. L’accès au laboratoire est d’ailleurs verrouillé.
Quand en revanche, il s’agit de parler de la genèse de cette aventure, Stéphane Tenoux est beaucoup plus loquace. Aujourd’hui président des trufficulteurs haut-alpins, il confie volontiers sa passion adolescente pour la truffe et son intérêt précoce pour le processus de mycorhization des plants. Il a commencé en se documentant et en expérimentant tout seul, en autodidacte, jusqu’à finir par élaborer une technique fiable qui l’a incité à en faire son métier. « Au début, se souvient-il, je passais pour un savant-fou. D’autant plus qu’il y a 30 ans, dans le département, il n’y avait aucune plantation truffière. Aujourd’hui, il y en a entre 100 et 120 ha, ce qui permet de mieux valoriser les terrains et de diversifier les exploitations. »
Dans la famille Tenoux, une passion comme celle-là se partage et se transmet. Depuis trois ans, Stéphane a ainsi été rejoint par Camille, sa fille. À l’heure actuelle, ils sont les deux seuls à pouvoir passer la porte du laboratoire et à connaître les secrets de fabrication mis au point par Stéphane. C’est donc en duo qu’ils réalisent les opérations de mycorhization des plants, mais aussi les recherches pour améliorer leurs techniques ou travailler sur de nouveaux produits.
Là encore, impossible d’en savoir plus, ils restent mystérieux, mais disent vouloir les dévoiler prochainement.
Ils produisent des milliers de plants qu’ils élèvent de bout en bout avant qu’ils ne partent, à l’âge de un ou deux ans, dans toute la France, voire dans toute l’Europe.
Des plants certifiés
Ils les font grandir et les bichonnent sous leurs serres, dans des godets anti-chignon qui leur permettent de conserver un système racinaire et radicellaire intact, ce qui favorise la reprise au moment de la plantation.
Tous leurs plants sont certifiés et contrôlés par le Centre technique interprofessionnel des fruits et légumes (CTIFL), l’une des deux certifications reconnues avec celle de l’Inrae. Le CTIFL contrôle les truffes qui vont servir à mycorhizer les plants, afin de garantir la pureté de l’inoculum, la bonne mélanisation et la contenance optimales en spores. Il va également contrôler les plants truffiers de un ou deux ans par échantillonnage, pour garantir leur mycorhization selon des critères qualitatifs et quantitatifs. Les plants seront ensuite étiquetés afin d’assurer leur traçabilité.
La pépinière produit plusieurs essences d’arbres, mycorhizés principalement à l’aide de deux types de truffes, pour répondre aux différents types de sols et de climats. D’abord la Tuber melanosporum, la fameuse truffe noire du Périgord, qui se développe dans des sols riches en calcaire actif, pas trop lourds, bien aérés et pas trop chargés en matière organique, avec un PH compris entre 7,5 et 8,5 et un rapport carbone/azote (C/N) aux alentours de 10. Ensuite la Tuber uncinatum, la truffe de Bourgogne, qui se récolte à l’automne et reste plus facile à implanter, car elle aime les terrains moins calcaires, plus lourds, plus riches en matière organique, dotés d’un rapport C/N plus élevé et d’un PH à partir de 7. Enfin, les Tenoux proposent également de la Tuber aestivum, la truffe d’été, mais elle est moins répandue.
Conseiller et orienter pour bien produire
Au niveau des essences arboricoles, ils cultivent bien évidemment plusieurs espèces de chênes, mais aussi des noisetiers, des résineux, des charmes, des tilleuls… etc.
Outre la production des plants, Stéphane et Camille Tenoux conseillent leurs clients sur l’essence et la variété à implanter, à partir d’une analyse de leurs sols et des conditions de plantation et de culture. Cette manière de procéder permet de garantir leurs plants. Ils dispensent des conseils de plantation, mais aussi d’entretien dès que leurs clients les sollicitent.
Ils ont également élaboré dans leur laboratoire des outils et des produits pour favoriser la croissance des arbres ainsi qu’un substrat de réensemencement.
Ils sont fiers de révéler que certains de leurs clients ramassent plus de 50 kg de truffes à l’hectare. Mais, là encore, l’omerta règne et les rendements restent secrets. « Pour cultiver de la truffe, il faut juste trois éléments essentiels, confie Stéphane Tenoux. La qualité du sol, un plant certifié et l’expérience du planteur pour le travail du sol, l’arrosage… etc. Si un client nous apporte son sol, nous pouvons l’aider à produire. Notre but est que nos clients puissent ramasser le mieux et le plus possible », souligne-t-il.
Premiers éléments de réponse dans quelques jours, avec l’ouverture des premiers marchés à la truffe en prévision des fêtes de fin d’année.
L’Espace Alpin
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