Petit boulot pour vieux clown, ou la machine à broyer de la société

Petit boulot pour vieux clown, de Matéi Visniec, occupe la scène du théâtre Toursky jusqu'au 29 janvier. Dernière pièce du dramaturge roumain, écrite dans sa langue natale avant son exil en France pour fuir le régime de Ceausescu, cette comédie grinçante est mise en scène par Virginie Lemoine et offre des rôles sur mesure à trois grands comédiens : Serge Barbuscia, Richard Martin et Pierre Forest.

culture

Diane Vandermolina

14 Jan 2022
2 minutes

Jusqu’au 29 janvier 2022, le théâtre Toursky présente sa création maison : Petit boulot pour vieux clown, de Matéi Visniec, écrite en 1986.

Des retrouvailles explosives

Trois vieux clowns aux costumes élimés, Filippo, Nicollo et Pepinno, sont en recherche d’un dernier emploi. Par le passé, ils formaient un trio avant que la vie ne les sépare, chacun roulant sa bosse de son côté, cahin-caha. Ils se retrouvent plusieurs dizaines d’années après dans la salle d’attente d’un music-hall à postuler pour un même petit boulot.

Lequel des trois décrochera le fameux contrat ? La bataille s’annonce rude entre les trois anciens collègues de jeu. A notre micro, les comédiens évoquent les particularités des personnages qu’ils incarnent dans la pièce et la versatilité de leurs rapports.

Être ou ne pas être clown ?

L’intérêt du texte réside dans le choix du clown : miroir grossissant de nos travers et mesquineries, il permet de dénoncer la pantomime sociale à laquelle nous participons. Il pointe du doigt l’interchangeabilité des individus dans leurs rôles sociaux et les jeux d’alliance auxquels la compétition les pousse.

Photo Spectacle Petit Boulot pour vieux clown - Visniec — Petit Boulot pour vieux clown de Matéi Visniec avec Richard Martin Serge Barbuscia Pierre Forest Mise en scène Virginie Lemoine © Jean Noël Barak

Bien que la pièce dresse un portrait au vitriol de la société, on se rit du clown, de sa maladresse ridicule, du comique de situation qu’elle engendre et de la chute toujours inattendue.

Récit tragique d’un dernier baisser de rideau

Entre Beckett, Fellini et Shakespeare, cette tragi-comédie féroce interroge notre humanité, nos illusions perdues et nos combats dérisoires, à l’image de ceux de Don Quichotte de la Mancha. Elle aborde en filigrane le problème de la réussite artistique. De nombreux artistes talentueux végètent ainsi toute leur vie sans jamais faire carrière. Dans l’interview qu’elle nous a accordée, Virginie Lemoine revient sur cette question et sur le thème central de l’œuvre présentée : la cruauté du monde extérieur.

Cette pièce à destination de tous les publics est, après plus de trente ans, toujours d’actualité : elle est visible au Toursky jusqu’à la fin du mois de janvier (soit 15 représentations, une rareté de nos jours) avant de partir en tournée en région puis à Paris.