Soignez vos jambes… pour échapper à la mort !

Il n'y a pas que les artères du coeur et du cerveau qui doivent être en bonne santé pour vivre mieux et plus vieux. Celles de nos jambes sont également fondamentales. Quand elles se bouchent, on avance moins vite et si on marche en deça de 3km/h, la mort nous rattrape inévitablement. Quels sont les signes d'alerte et comment intervenir ? Les médecins niçois ont des solutions.

Santé

Le professeur Georges Lefthériotis est toujours sûr de son effet. Et c’est sur la scène du Parc Phoenix de Nice, cette fois, qu’il a fasciné son auditoire invité par notre média MProvence à s’informer sur les maladies cardiovasculaires. Ce ponte de la médecine vasculaire au CHU de Nice y est allé cash : « On parle du coeur, du cerveau, mais peu de vos jambes. Or les jambes, ça sert à aller acheter son pain, à rendre visite à sa compagne, à se promener. Sans nos jambes, on ne peut pas vivre. Parmi vous, combien ont déjà fait un dépistage vasculaire de leurs jambes ? »

Silence dans la salle. Parmi les 90 auditeurs, dont une majorité de sexagénaires et de septuagénaires, aucune main ne se lève. « Cet examen durant lequel on mesure la pression sanguine dans vos deux bras et vos deux jambes permet de dépister l’artérite. Il prend 10 minutes. Les médecins généralistes ne le font pas. »

On croit que c’est une sciatique…

Après 70 ans, une personne sur dix est touchée par ce problème. « Au début, on ne sent rien. Puis on claudique, ça tire, mais on se dit que c’est une sciatique. En fait ce sont vos artères qui se bouchent et vos cellules manquent d’oxygène. Ensuite vous avez des douleurs dans les jambes même au repos, vous devez vous lever pour les atténuer. Enfin les cellules meurent, vos orteils deviennent un peu noirs, ils se nécrosent. Et ça peut finir par l’amputation du pied voire de la jambe. »

Le Pr Lefthériotis invite donc tout un chacun à faire contrôler sa pression artérielle et en cas de doute à en parler à son médecin traitant et à prendre rendez-vous avec un médecin vasculaire. Car il existe diverses solutions.

On peut poser des stents jusqu’à 90 ans !

« On peut réaliser des pontages sur les artères malades, sous anesthésie générale, ou même poser des stents et ceci jusqu’à plus de 90 ans. » Et de rappeler cette étude australienne glaçante qu’on devrait tous avoir en tête : la mort marche à 3,2 kilomètres/heure. Si vous marchez moins vite, cela signifie que vous n’êtes pas en bonne santé et que votre fin approche dangereusement ! « Les chercheurs australiens ont observé un groupe de personnes et ont constaté que toutes celles qui marchaient à une vitesse inférieure à 3,2 km/h sont décédées avant les autres. »

Avant d’en arriver à la chirurgie, on peut heureusement prendre les devants ! Cela passe par traiter les facteurs de risque, comme l’hypertension artérielle qu’il convient absolument de juguler. Achetez-vous un brassard en pharmacie et prenez votre tension 3 fois par jour pendant 3 jours consécutifs une fois par mois en notant les chiffres pour les amener à votre médecin. Autre recommandation : le diabète et le cholestérol. Et on ne parle même pas du tabac à supprimer absolument.

Et la marche ? C’est tous les jours. Minimum 30 mn à un bon rythme. Le Pr Lefthériotis préfère encourager à en faire un peu plus, entre 8 et 10 000 pas. Sinon le vélo c’est aussi excellent, même le vélo d’appartement.

Menaces sur les femmes !

La Dr Elise Poggi, médecin vasculaire à l’hôpital d’Antibes et au CHU de Nice, a fait un focus sur les maladies cardiovasculaires chez les femmes. Elles sont bien plus menacées que les hommes ! « C’est la première cause de mortalité chez la femme, elles tuent 6 fois plus que le cancer du sein qui est la seconde cause. La femme présente des facteurs de risque hormonaux spécifiques. »

Même constat pour le tabac, dont la consommation féminine est montée en flèche depuis 30 à 40 ans. « A tabagisme égal, les femmes ont 25% de risque d’accident cardiovasculaire en plus. Une femme qui fume toute sa vie a une perte d’espérance de vie de 11 ans. Mais il n’est jamais trop tard pour arrêter et regagner des années de vie. »

Dr Elise POGGI, médecin vasculaire, CH Antibes
Dr Elise POGGI, médecin vasculaire, centre hospitalier d’Antibes et CHU de Nice.

HTA : la tueuse silencieuse

On sait également que l’obésité est plus marquée chez les femmes. Celle-ci est responsable d’un quart des maladies cardiovasculaires. Un chiffre à conjuguer avec celui du diabète impliqué dans 44% des cas. La Dr Poggi met également en garde sur l’emploi de la contraception oestro-progestative qui augmente le risque, de façon modérée jusqu’à 35 ans, et plus sérieusement après.

Mais son alerte la plus forte concerne l’hypertension artérielle (HTA). « C’est une redoutable tueuse silencieuse. Après 50 ans, une femme sur deux est hypertendue. C’est vrai également lors de la prise de contraception et durant la grossesse. Le problème est que 40% des femmes hypertendues ne savent pas qu’elles le sont. » Et donc ne prennent pas de traitement et s’exposent de manière significative à l’infarctus ou l’AVC.

Dormez, braves gens…

On le sait, en raison souvent de la charge – qui n’est pas que mentale – qui pèse notamment sur les mères de famille, le stress peut s’inviter dans ce sombre tableau. « C’est le 3e facteur de risque après le tabac et le cholestérol. » Enfin, il faut DORMIR ! « Dormir moins de 6 heures par nuit de manière chronique augmente de façon significative le risque cardiovasculaire. »

Prenant le relais, le Dr Christophe Bonnin, médecin vasculaire, en a rajouté une louche sur le tabac. « Dès lors qu’on fume, même une seule cigarette par jour, le risque d’accident cardiovasculaire est augmenté de 50%. Le dénominateur commun de toutes ces maladies, c’est la plaque d’athérome qui se forme dans nos artères et qui va finir par les boucher ou se détacher pour provoquer un infarctus, un AVC ou de l’artérite. 31% des Français fument, 50% sont en surpoids, 27% ont de l’hypertension. »

Dr Christophe BONNIN, médecin vasculaire, CHU Nice
Dr Christophe BONNIN, médecin vasculaire, CHU de Nice

Voilà ce qu’il faut faire !

« Pour ne pas faire d’accident cardiovasculaire, il faut : ne pas fumer, ne pas avoir de diabète et présenter un IMC (indice de masse corporelle) compris entre 20 et 25, ne pas être hypertendu et avoir un taux de cholestérol inférieur à 1,5 g/L et inférieur à 1g/L pour le LDL-C (idéalement 0,7). » Je vous vois déjà vous précipiter sur vos dernières analyses de sang… Gare à la consommation d’oeufs : le Dr Bonnin en recommande 2 par semaine, y compris ceux qui sont dans les gâteaux ! L’omelette va être petite…

Exerçant au CHU de Nice, le Dr Bonnin aime bien réaliser un tableau de votre risque cardiovasculaire. « Il faudrait l’évaluer à partir de 40 ans chez l’homme et de 50 ans chez la femme, puis le renouveler tous les cinq ans, et après chaque grossesse. Avec ce tableau nous pouvons estimer votre risque de faire un infarctus ou un AVC dans les dix années suivantes. »

Erection molle : c’est peut-être vos artères

Dernier conseil Messieurs (qui impacte directement les Dames cependant), la dysfonction érectile peut être un marqueur de risque cardiovasculaire. En un mot : si vous bandez mou, c’est peut-être que vos artères sont encrassées, et pas un problème de libido. N’hésitez pas : direction le cardiologue ou le médecin vasculaire qui va contrôler la tuyauterie générale.

L’AVC. Le Dr Pascal Giordana avait gardé l’information sur cette terrible menace pour la fin de la conférence. 1 Français sur 5 fera une attaque cérébrale au cours de sa vie… sauf à modifier son hygiène de vie et surveiller sa tension, notamment. Le médecin a fortement insisté sur l’alimentation qui est un facteur de risque modifiable (à la différence de l’âge, du sexe et de l’hérédité au premier degré). Il a également appelé à l’observance des traitements.  Plusieurs questions ont surgi à propos des effets secondaires des médicaments, qu’il faut parfois malheureusement accepter a rappelé le Dr Giordana.

 

Dr Pascal GIORDANA, médecin vasculaire, CHU de Nice
Dr Pascal GIORDANA, médecin vasculaire, CHU de Nice (Photos Killian BLISSON, MProvence).

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