« Les agriculteurs font le nécessaire au quotidien pour économiser l’eau, et cela au péril de leur production, mais tout le monde doit jouer le jeu et tout le monde doit entretenir les canaux d’irrigation ! L’agriculture souffre déjà assez, pourquoi subir leurs erreurs ? La profession agricole en a ras-le-bol de ces gaspillages ! »
Selon Florian Pellegrin, vice-président de JA 05 et président de JA Paca, ces erreurs consistent en des fuites non réparées depuis une vingtaine d’années, un rapport faisant état à cette époque-là de 150 l/s perdues à cause de fuites. Soit 13 millions de litres. « La situation s’est sans doute dégradée depuis », précise-t-il. Et de compléter : « Cela représente la consommation d’eau quotidienne de 90 000 habitants ! »
Un dialogue de sourds plus qu’un échange
Le cortège s’est ensuite déplacé en direction du siège administratif du canal de Gap. Le président Robert Nebon et le directeur Vincent Detruchis acceptaient de recevoir et dialoguer avec les agriculteurs. Les échanges s’apparentaient d’emblée à un dialogue de sourds, tant les usagers de l’eau étaient vindicatifs, s’appuyant sur la situation qu’ils dénonçaient.
« Alors, les réclamations, c’est quoi ? », interpellait le directeur de l’Association syndicale autorisée qui œuvre dans le bassin gapençais. Le ton était donné. « Sur les 17 km de son parcours, seules quelques centaines de mètres ont été réparées ou entretenues », rétorquait Florian Pellegrin. Sandrine Hauser venait tout juste d’affirmer : « aujourd’hui, il y a de grandes difficultés sur l’eau ; il faut apporter les soins nécessaires pour économiser cette denrée qui se fait rare ». Vincent Detruchis : « j’entends dire que l’eau du canal est mal gérée. La région de Gap est a contrario la mieux gérée ! Nous développons et organisons la ressource ».
En écho, les agriculteurs réagissaient : « nous y sommes pour quelque chose ! » Concernant les fuites, le directeur apportait des précisions : « le système d’irrigation est centenaire, il est en terre ; nous décelons 5 l/s de déperdition au kilomètre. Envisager le cuvelage (couche résistante à base de béton, qui protège le lit du canal et ses côtés, afin d’offrir une force suffisante pour résister à la pression de l’eau, Ndlr) est financièrement impossible sur la totalité du canal. »
« Notre première mission est de travailler pour vous »
Au cours de la visite sur le terrain qui a précédé, une martelière fermée laissait néanmoins s’échapper une quantité d’eau assez importante, ce qui avait beaucoup surpris les syndicalistes. « C’est voulu de laisser passer de l’eau », répondait Vincent Detruchis.
Parmi les 12 000 irrigants adhérents du canal de Gap, il y a un contingent important de particuliers et ce flux s’échappant du canal principal leur est partiellement destiné. 22 000 parcelles sont irriguées par le canal et les 40 000 habitants de Gap sont alimentés en eau potable.
« Notre première mission est de travailler pour vous », rappelait le directeur et le président Robert Nebon s’érigeait contre le procès qui lui est fait : « des kilomètres ont été réparés, nous n’avons pas rien fait ! » Le directeur énumérait les travaux réalisés : « la réserve de Corréo, c’est 10 M€ pour 350 000 mètres cubes ; le lac des Jaussauds a vu son volume agrandi de 150 000 mètres cubes ; 4 M€ investis sur la prise d’eau des Ricoux, au départ du canal ; chaque année, 300 000 € sont consacrés au remplacement des conduites corrodées ».
Chacune des parties ayant argumenté, il restait à aborder l’avenir, même brièvement. « Le problème est celui de la ressource en eau. Le projet de la réserve de la Garde a avorté suite à des recours en justice. Celui du Châtelard est en cours, pour une capacité de 950 000 m 3 . » Pour les agriculteurs, « le problème ce sont les délais ! »
Afin que le canal de Gap détienne la maîtrise foncière, c’est précisément une question de temps. « Le dépôt du dossier devrait être déposé dans les huit mois qui viennent », assurait le directeur. Finalement, bien que difficile, le dialogue a eu lieu.
Maurice Fortoul
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