Cancer de la Prostate : la révolution du dépistage et des traitements

Encore méconnu, ce cancer est pourtant le plus fréquent chez l'homme avec 50 000 nouveaux cas dépistés chaque année en France. Les progrès technologiques ont permis de limiter les surtraitements et l'intelligence artificielle devrait encore améliorer la prise en charge. Le professeur Matthieu Durand, chirurgien-urologue à l’Hôpital Pasteur 2 de Nice, rappelle le danger de cette maladie et détaille ces évolutions. Il animera une conférence avec une dizaine de médecins spécialisés sur ce cancer mercredi 7 décembre de 15h30 à 17h au Centre Universitaire Méditerranéen (65 Promenade des Anglais, à Nice, entrée libre).

Prostache 2022
Est-ce que les Niçois vous semblent particulièrement préoccupés par leur santé, et leur prostate en particulier ?
Professeur Matthieu Durand : Que ce soit à Nice ou en France, les hommes s’interrogent sur leur bien vivre et ça passe tout d’abord par porter attention à certaines maladies que l’on peut éviter, notamment en répondant ou en suivant des campagnes de dépistage. Il est vrai que le département des Alpes-Maritimes a un âge moyen de 43,2 ans, supérieur à celui de la France métropolitaine (40,2 ans) et de la région PACA (41,9 ans). Le Niçois s’intéresse plus spécifiquement à cette question du cancer de la prostate.

Estimez-vous que le cancer de la prostate reste un sujet tabou ?
Je dirais que ce n’est pas tabou, même si les médias le décrivent ainsi. Je pense que ce n’est pas connu, ou du moins mal connu par les concernés. Il est important d’accentuer une meilleure information à destination des hommes.

Ne mélangeons pas tout !

Trouvez-vous que la communication au sujet de la prévention organisée de cette maladie est suffisante ?
L’information qui passe par la prévention et la sensibilisation doit être accentuée sur la différenciation entre l’adénome de prostate et le cancer de la prostate. C’est cette différence qui doit être davantage mise en avant. L’élément essentiel dans la sensibilisation est de créer une interrogation sur la prostate, qui doit conduire à aller se faire dépister. Il est primordial de communiquer auprès des personnes concernées, donc les hommes de plus de 50 ans en général ou à partir de 40 ans s’ils ont des antécédents familiaux.
Quand on évoque la prostate, on parle d’une seule maladie ou de plusieurs ?
Il y a deux maladies qui se ressemblent de par le même lieu, la prostate. Mais elles ont des conséquences complètement différentes. Il est important de renseigner les hommes qui confondent souvent le cancer de la prostate avec l’adénome de prostate, aussi nommé hypertrophie bénigne de la prostate. Attention, cette dernière est une maladie qui arrive entre 50 à 60 ans, au lieu de 60 à 70 ans (en moyenne) pour le cancer. La différence, ce sont les symptômes.
Pour l’adénome, il y a l’apparition de problèmes urinaires, on peut parler d’une gêne pour uriner, comme se lever dans la nuit, uriner avec moins de pression. Ces symptômes arrivent avec l’âge et sont propres à l’adénome de prostate, et non en lien avec le cancer de la prostate. Il est important de souligner le faux-ami entre l’adénome et cancer de la prostate. L’adénome est bénin avec une gravité de symptôme urinaire entre 50 et 60 ans. A l’inverse du cancer qui est malin et commence plutôt vers 60 ans et nécessite un dépistage. Ce dernier est insidieux et ne donne aucun signe. C’est pourquoi nous maintenons des journées d’information.
IRM et biopsie en cas de doute
 
Comment vos patients ont-ils été informés de ces maladies prostatiques ? Grâce à leur médecin
ou leur entourage ?

Ils viennent le plus souvent parce qu’ils ont été informés par leur médecin traitant ou par une journée d’information pour éveiller leur curiosité. Il y a d’autres sources d’information comme la presse, un ami, le conjoint…
Comment se déroule le dépistage ?

Tout d’abord, si un homme doit se faire dépister, c’est à l’âge de 50 ans ou à 40 ans s’il y a des antécédents familiaux. Premièrement, il y aura une prise de sang permettant le dosage du PSA (antigène prostatique spécifique). C’est un examen de référence pour faire le diagnostic du cancer de la prostate. Le PSA est une protéine qui circule dans le sang et qui est sécrétée par la prostate. Il est donc possible de doser sa concentration par une prise de sang. Le PSA est un marqueur d’activité prosthétique.
Ensuite, il existe un autre moyen en complément du PSA, le toucher rectal. S’il y a un doute dans l’un des deux examens, on demandera une IRM de la prostate. S’il y a toujours une incertitude quant à la présence d’un cancer, nous effectuerons une biopsie (prélèvement sous anesthésie générale, NDLR) de la prostate qui révélera, peut-être, un cancer de la prostate. Après quoi, le patient pourra bénéficier de plusieurs traitements.

100 robots pour opérer ce cancer en France

Quels sont les traitements ?

Le traitement de la prostate est différent selon la nature du cancer, s’il est agressif ou non, gros ou petit, localisé ou étendu. Parmi tous les traitements, il peut y avoir une simple surveillance active sans opération ou une radiothérapie ou une hormonothérapie, ou enfin une intervention chirurgicale par robot. Ces traitements ont pour la plupart un seul et unique objectif : la guérison. Pour cela, il faut consulter un urologue. Mais prudence, il ne faut pas confondre l’adénome de prostate et cancer de la prostate.
Qu’est ce qui a changé depuis 20 ans dans l’intervention de la prostate pour l’urologue et chez le patient ?
Une innovation majeure réside dans le diagnostic avec des outils plus performants pour mieux trouver le cancer. Cela s’appelle la biopsie perfusion échographie IRM et on en parlera à la conférence de Nice (NDLR: elle se déroulera le 7 décembre à 15h30 au Centre Universitaire Méditerranéen au 65 de la Promenade des Anglais; cette conférence est ouverte au public et réunira certains des meilleurs spécialistes de la région. Inscription gratuite sur contact@dstmedition.com). Ensuite, il y a l’innovation par l’imagerie avec des traitements plus précis, avec moins de conséquences pour le patient, notamment par chirurgie robotique. La chirurgie robotique, ça fait plusieurs années qu’on l’utilise. A chaque avancée technologique, nous bénéficions d’une plus grande précision qu’avant. En France, il y a une centaine de robots au service du cancer de la prostate.

Ne pas surtraiter des patients avec un cancer peu grave

Et si on se projette dans 10 ans, qu’est ce que vous aimeriez améliorer ?
J’aimerais être sûr que l’on traite tous les patients qui nécessitent d’être traités et qu’ils soient soulagés de cette maladie. Que l’on sache identifier des cancers qui ne sont pas graves, et qui ne nécessitent pas de traitement afin de ne pas surtraiter. Au niveau des méthodes, elles sont plus spécifiques, je veux parler de l’alliance du robot avec l’intelligence artificielle (IA) qui améliorera encore plus la précision des gestes.
Une question préoccupe particulièrement certains jeunes. Y a-t-il un lien entre le cancer de la prostate
et son orientation sexuelle ?
Pas du tout, aucun lien ! Les seuls facteurs de risque pour le cancer prostate sont l’ âge et les antécédents familiaux (NDLR : si un ascendant – père, frère, oncle… – a déjà eu un tel cancer). Aucun lien avec son orientation sexuelle.

Propos recueillis par Maud Latière, étudiante en master Cosan 2 à l’Ecole de journalisme et de communication d’Aix-Marseille
 
Une conférence ouverte au public se déroulera également à Marseille mardi 13 décembre à 17h au Palais de la Bourse (9 La Canebière, 13001 Marseille). Inscription recommandée sur contact@dstmedition.com

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