Chaque jour, il faut sauver sa peau

Ça vous gratouille ou ça vous chatouille ? 1 Français sur 20 souffre d'eczéma. Dermatite atopique, urticaire, rougeurs et boutons en tout genre... Nous ne prenons pas suffisamment soin de cette formidable barrière qui protège notre corps : la peau. Le savon de la douche, le tabagisme, les détergents, la pollution et le soleil, constituent de redoutables agresseurs quotidiens. Alors, notre organisme se rebelle et notre peau nous fait souffrir. D'autres causes provoquent des maladies parfois invalidantes. Il existe heureusement des traitements très efficaces, comme l'explique le docteur Astrid Bellissen, dermatologue à l'hôpital Edmond-Garcin d'Aubagne et à l'hôpital nord de Marseille.

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Quelles sont les maladies de peau les plus fréquentes ?

Docteur Astrid Bellissen : Ce sont principalement l’eczéma, qui touche près de 5% des Français, et le psoriasis. Il y a l’eczéma de contact, qui est une réaction à un produit en contact directement sur la peau, et il y a l’eczéma atopique qui est une dermatose inflammatoire chronique liée à un problème de la barrière cutanée et une hyperactivation du système immunitaire.

Comment repère-t-on cette dermatite atopique ?

Elle apparaît principalement dans la petite enfance mais on a également des premiers symptômes pouvant arriver à l’âge adulte. C’est une maladie chronique, qui gratte, donc ce sont les localisations qui vont nous permettre de faire le diagnostic. A l’âge adulte c’est plutôt dans les plis des coudes et des genoux, et dans la petite enfance plutôt sur les convexités de l’abdomen et du visage.

Un arsenal thérapeutique très vaste

Les gens repèrent-ils eux-mêmes ces maladies ?

Souvent ils savent mettre le nom d’eczéma sur leur maladie, mais ne savent pas forcément faire la différence entre un eczéma de contact et un eczéma atopique. Ils pensent souvent qu’il y a une allergie liée à leur problème de peau. Ce qui n’est pas le cas de la dermatite atopique puisqu’elle repose sur un problème de déficience de la barrière cutanée. Des produits irritants, pas forcément des allergènes, passent à travers la barrière cutanée et provoquent une hyperactivation du système immunitaire de manière disproportionnée, qui s’enflamme et qui va donner lieu à de l’eczéma qui gratte et qui fait souffrir.

Comment soigne-t-on ces maladies ?

Cela va dépendre de la demande du patient et de son ressenti. On a un arsenal thérapeutique très vaste. Cela va dépendre des contraintes du patient, de son travail, de son activité, de savoir si c’est un enfant scolarisé ou pas, de ses antécédents médicaux, s’il a des contre-indications, et de la sévérité de la maladie. C’est-à-dire jusqu’à quel point elle le fait souffrir, quelle est sa demande.

Les traitements sont-ils systématiquement des pommades, ou des médicaments ?

En première intention on donne des pommades. On a les dermo-corticoïdes, du tacrolimus topique. Après, en fonction de la sévérité, on peut mettre en place en première ligne des traitements comme les cabines de photothérapie, les immunosuppresseurs. Et on a des secondes lignes avec les biothérapies.

Pas d’animaux dans la chambre

Arrivez-vous à réellement soulager les patients ?

On a des traitements efficaces, notamment avec l’arrivée des biothérapies qui marchent assez rapidement sur l’eczéma atopique et ça reste bien toléré. Ce sont des traitements à prescription initiale hospitalière et qui peuvent être renouvelés par le dermatologue de ville.

On évoque souvent l’influence de l’environnement sur notre santé. A-t-il également un impact sur notre peau ?

Oui pour l’eczéma atopique. On recommande aux patients souffrant de dermatite atopique de ne pas surchauffer la maison, de bien aérer, de bien dépoussiérer, d’éviter les animaux dans la chambre. Le tabagisme, actif ou passif, agresse la peau. Comme la pollution, la macération, les vêtements synthétiques. Il y a des mesures à prendre pour améliorer le confort de la peau. Et ce n’est pas négligeable. Pareil avec l’utilisation d’huile de douche à la place de savon. Elle va moins dessécher la peau, la barrière cutanée sera moins agressée. Il y aura plus de gras sur la peau et elle sera donc mieux protégée.

Acné : gare aux cicatrices !

On entend dire que les traitements médicamenteux pour la peau doivent être pris avec précaution. Comportent-ils des dangers ?

Quel qu’il soit, un médicament comporte des bénéfices et des risques. Il n’y a aucun médicament qui n’ait pas d’effets indésirables, d’effets secondaires. C’est toujours une balance bénéfices/risques. En fonction de la sévérité de la maladie, on mesure ce qu’on accepte comme risque.

Un sujet intéresse particulièrement les adolescents, et par ricochet leurs parents, c’est l’acné. A partir de quel moment conseillez-vous de la traiter ?

Je ne conseille pas de la traiter. Enfin, cela dépend de l’impact du ressenti de l’adolescent vis-à-vis de son acné. Les acnés sévères engendrent des cicatrices qui sont parfois irréversibles, quoique maintenant on a des traitements esthétiques. Mais cela demande des prises en charge secondaires. Quand ce sont des acnés à risque de cicatrices, comme des gros kystes, effectivement il faut essayer de les traiter.

Mais cela peut avoir un impact social pour des jeunes qui ont beaucoup d’acné. Doivent-ils prendre leur mal en patience ou bien peuvent-ils bénéficier d’un traitement efficace ?

Je ne dis jamais de prendre son mal en patience. On a toujours des possibilités de traitement. En première intention avec des soins locaux puis on passe à des traitements médicamenteux comme les antibiothérapies et les autres rétinoïdes qui marchent très bien.

80 000 cancers de la peau par an

Nous allons évoquer les cancers de la peau, réputés agressifs. Sont-ils fréquents, comment les prévenir ?

Tous confondus, les cancers de la peau représentent à peu près 80 000 cas en France chaque année. Principalement, ce sont les carcinomes cutanés qui affectent les personnes âgées. Ce sont les carcinomes basocellulaires qui sont les plus fréquents mais qui ne donnent jamais lieu à des métastases, qu’on peut classer comme bénins. Après on a les carcinomes épidermoïdes qui représentent à peu près 20% des cancers cutanés. Et enfin le mélanome qui représente 10% de ces cancers, qui sont agressifs et dangereux, qui nécessitent d’être pris en charge très précocement.

L’été arrive. Se méfie-t-on et se protège-t-on suffisamment du soleil, particulièrement dans notre région ?

Je pense que non. Quand je pose la question « est-ce que vous vous exposez souvent au soleil », les gens me répondent : « Non, je ne vais pas à la plage. » En fait on ne s’expose pas au soleil qu’en allant à la plage. Quand on jardine, quand on est dehors, quand on fait de la randonnée, quand on court, quand on va nager, on est exposé au soleil et, cela, les gens n’en ont pas conscience. Donc on ne se protège pas assez dans la journée.

Quels conseils donner pour se protéger du soleil systématiquement ?

Par le port de vêtements adaptés, éviter les heures chaudes, entre midi et deux. Mettre de la crème solaire et penser à la renouveler régulièrement.

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