Erection: les solutions quand ça coince

Les hommes parlent de plus en plus ouvertement à leur médecin de leur sexualité, et consultent volontiers accompagnés de leur épouse. Si certains sont très actifs au-delà de 85 ans, d'autres peuvent avoir des troubles érectiles dès 50 ans. Le docteur Thomas Maubon, urologue à l'Institut Paoli-Calmettes (Marseille), rassure les hommes et détaille la panoplie des thérapies pour retrouver une sexualité épanouie. A condition de vérifier l'absence de maladies cardiovasculaires...

autre

Beaucoup de patients viennent vous voir car ils sont confrontés à des problèmes d’érection. Comment les prenez-vous en charge?

Docteur Thomas Maubon : On va s’attarder premièrement sur l’ancienneté des troubles. Est-ce un phénomène récent, relativement brutal ou qui s’est peu à peu, avec le temps, aggravé ? Généralement il s’agit de problèmes organiques avec des troubles qui se sont peu à peu aggravés. Globalement, plus c’est brutal, plus c’est suspect d’origine psychologique. On rassure ces patients sur la bénignité du trouble. Il s’agit rarement de quelque chose de grave. Mais derrière ces troubles de l’érection, il faut aller chercher des pathologies qui sont souvent présentes chez le patient.

Les troubles de l’érection touchent souvent les hommes d’âge mûr, passée la cinquantaine. Ce sont des hommes généralement sédentaires, avec des facteurs de risque cardiovasculaires significatifs, un diabète, de l’hypertension artérielle, un tabagisme assez actif. Ce sont plusieurs éléments à prendre en compte et qu’il va falloir traiter pour tenter d’améliorer la dysfonction érectile du patient. Ensuite il y a une ordonnance à vérifier. Souvent ces patients sont avec d’autres traitements, comme des anti-hypertenseurs, des anti-cholestérolémiants, qui peuvent avoir un impact sur la qualité des érections des hommes.

Bilan cardiovasculaire recommandé

Les gens viennent-ils facilement vous parler de ces problèmes ou bien le sujet reste-t-il encore tabou ?

La capacité d’en parler est de plus en plus facile pour les patients. Si l’on remonte 20 ou 30 ans en arrière, il n’y avait pas beaucoup de solutions à proposer à ces hommes. Du coup, les urologues étaient relativement peu bavards sur le sujet. Aujourd’hui on a quand même relativement des solutions médicamenteuses et des traitements locaux très efficaces permettant aux hommes d’avoir des érections tout à fait normales, et donc une sexualité épanouie.

Quelle est la prise en charge urologique que vous proposez ?

Une fois qu’on a fait le point sur les potentiels facteurs de risque cardiovasculaires qui peuvent aggraver la fonction érectile – en général on adresse le patient à un cardiologue ou un endocrinologue pour faire le point. Une fois qu’on a éliminé des causes potentiellement curables, on propose au patient dans un premier temps des thérapies médicamenteuses orales que sont la famille des médicaments IPDE5, les inhibiteurs de la phosphodiesterase, connus sous le nom de Viagra, Cialis, Levitra, Spedra. On commence avec de faibles doses et le patient adaptera au besoin. Généralement, il est prudent de faire un bilan cardiovasculaire pour s’assurer qu’il n’y a pas de troubles sous-jacents ou de risque d’infarctus suite à la prise de ces médicaments.

Du Viagra à la prothèse qui se gonfle

Quelles solutions si les médicaments ne sont pas suffisamment efficaces ?

On peut alors être amené à proposer au patient des injections intra-caverneuses. On n’a plus les effets secondaires généraux des médicaments puisqu’il agit directement dans le pénis. Le patient réalise une injection avec une toute petite aiguille, c’est très peu douloureux, au niveau du pénis, avant le rapport. Ce traitement est très efficace et permet d’avoir une érection. On adaptera la posologie à la qualité de l’érection voulue.

Il existe aussi des traitements pour lesquels on injecte dans l’urètre des prostaglandines, qui sont les mêmes molécules que les injections intra-caverneuses. Il existe d’autres solutions plus mécaniques, comme le vacuum, une pompe qui permet de faire une dépression autour du pénis et donc d’augmenter le volume du pénis et de créer un afflux sanguin, qu’on va maintenir avec un anneau qu’on mettra à la base de la verge. En dernier recours, si le patient n’est pas satisfait de ces méthodes et préfère une solution radicale, on peut lui proposer une prothèse de verge qui se gonfle avant les rapports à l’aide d’un petit système placé dans le scrotum.

L’andropause n’est pas obligatoire !

Parlez-nous de l’andropause, qui est un peu le pendant de la ménopause. Quand survient-elle, et est-elle inévitable ?

La ménopause est obligatoire pour les femmes. L’andropause n’est pas du tout obligatoire pour les hommes. Le niveau de testostérone qu’on peut doser dans le sang n’est pas du tout corrélé au niveau de ressenti du patient, comme pourraient l’être les symptômes de l’andropause. On a des patients avec des taux de testostérone tout à fait normaux avec des libidos très, très faibles. Et des patients avec des testostérones basses avec des libidos et une qualité de vie sexuelle tout à fait acceptables. Donc l’andropause ne touche pas tous les hommes.

Il faut y penser, nous urologues, face à un patient qui va se plaindre de fatigue, perdre un peu ses poils, qui va avoir une petite fonte musculaire, des fractures osseuses un peu atypiques, une perte de l’élan vital, des troubles du sommeil, des bouffées de chaleur que l’on peut retrouver chez la femme enceinte. Mais c’est rare qu’on ait un symptôme isolé qui fasse penser à l’andropause. Ce n’est jamais rien de grave. C’est quelque chose de physiologique que l’on peut parfaitement prendre en charge avec des injections de testostérone, en s’assurant préalablement qu’il n’y a pas de risque de cancer de prostate préexistant.

Tranquille jusqu’à 65 ans…

Il y a un âge à partir duquel survient généralement l’andropause ?

C’est rarement avant 65 ans.

Faut-il un jour renoncer à avoir une sexualité épanouie parce qu’on est tout simplement trop âgé ?

Dans notre patientèle, tous urologues confondus, on assiste à d’authentiques patients qui ont des sexualités tout à fait épanouies à plus de 85 ans. On a des patients qui à 65 ou 70 ans n’ont plus du tout d’activité sexuelle et qui ne s’en plaignent pas ! Ce que nous, urologues, nous devons traiter et sur quoi nous attarder, c’est si l’absence de sexualité a un retentissement comme un vécu pathologique pour le patient. C’est là que nous devons intervenir pour leur proposer des solutions. Si l’absence de sexualité n’a aucune conséquence sur l’épanouissement du patient, du couple, de la famille, s’il n’y a pas de réelle demande du patient pour un traitement, on n’est pas en devoir de lui proposer un traitement oral pour améliorer la qualité de ses érections. Vouloir traiter coûte que coûte un patient qui ne se plaint pas, ça n’a pas de sens.

Les femmes s’accommodent d’érections moins performantes

Est-ce que ces démarches se font en couple, voyez-vous la femme du patient ?

Oui. Les patients viennent souvent accompagnés de leur épouse. C’est pour nous intéressant d’avoir les deux sons de cloche concernant cette pathologie qui touche le couple de toute façon. On s’aperçoit bien souvent que les femmes ne se plaignent pas tant que ça de la qualité des érections de leur mari, parce qu’en fait, dans la sexualité, il n’y a pas que l’érection ! Il y a plein d’autres choses qui touchent la sexualité. L’érection n’est qu’une finalité en soi permettant la pénétration. Plein de femmes, à partir d’un certain âge, s’accommodent très bien d’érections moins performantes que pour un patient qui a 20 ans.

Donc il faut que les hommes se déstressent un peu sur la question ?

En effet. Le bilan qu’on organise, nous, urologues, autour des problèmes d’érection, a un rôle très important pour prévenir des facteurs de risques cardiovasculaires chez les patients car c’est quand même la principale cause de mortalité aujourd’hui, largement devant le cancer de la prostate. Un patient qui vient à votre consultation pour des problèmes d’érection, déjà on évalue le retentissement pour savoir si oui ou non il faut traiter; et deuxièmement on va chercher ces facteurs de risque qu’on va pouvoir traiter en luttant contre la sédentarité, une hygiène de vie et l’activité physique.

cet article vous a plu ?

Donnez nous votre avis

Average rating / 5. Vote count:

No votes so far! Be the first to rate this post.

Partagez vos commentaires.