L’ostéopathie au secours des mamans… et des bébés !

Nicolini, Thomas. Son nom parlera aux supporters de handball car il était encore récemment joueur professionnel. Devenu ostéopathe, il s'est installé au sein d'un cabinet médical à Marseille pour prendre en main les futures et les jeunes mamans en souffrance, ainsi que les nouveau-nés. La demande progresse.

Santé

Vous êtes ostéopathe et vous êtes spécialisé en périnatal avec une prise en charge plutôt tournée vers les femmes enceintes, les femmes en post-partum et les troubles gynécologiques en général, et vous vous occupez des bébés aussi ! On ne pense pas toujours à l’ostéopathie pour ces publics. En quoi consistent vos interventions ?

Thomas Nicolini : L’ostéopathie est une thérapie manuelle où on va aborder le corps des patients de manière globale. Les gens viennent par rapport à des symptômes, des motifs de consultation, et on essaie de trouver les causes. Souvent il y a plusieurs causes sur une même douleur. Ma prise en charge est plutôt tournée sur le domaine périnatal et aussi les bébés même si chaque ostéopathe reste généraliste.

On en parle peu, mais une grossesse c’est une modification profonde et durable pour le corps tout entier. Sur un plan physiologique, expliquez-nous !

Effectivement, tout se modifie. Du rythme cardiaque à la posture. L’augmentation de la taille de l’utérus avec le bébé dedans va apporter des modifications du corps de la future maman. Nous allons travailler par rapport aux conséquences liées à ce développement tout au long de la grossesse, et qui peuvent amener des douleurs dues à ces modifications. On retrouve souvent des douleurs de type lombaire – des lombalgies. On parle aussi de sciatalgie, c’est-à-dire des douleurs qui se situent sur un trajet du nerf, qui est le sciatique notamment. On va avoir une approche pour essayer de soulager ces douleurs, ces maux. On retrouve d’autres pathologies, d’autres symptômes dans notre prise en charge et le but c’est d’offrir un meilleur accompagnement à chaque femme puisque chaque femme va ressentir des choses différentes avec des déroulés de grossesse différents aussi. Nous sommes là en accompagnement, en parallèle du corps médical et notamment de la prise en charge des gynécologues.

Des douleurs vives et incapacitantes chez la maman

Est-ce que ce sont des souffrances qui parfois peuvent être aiguës, qui peuvent être fortes ?

Eh oui ! C’est toute la problématique, ça peut même être incapacitant dans certains cas. Pendant une grossesse, il y a peu de réponses thérapeutiques, médicalisées. Finalement, on trouve notre place dans cette prise en charge où on essaie avec plus ou moins de succès – ça dépend des différences physiologiques de chaque femme – de régler ces douleurs là.

La grossesse est quand même déjà très médicalisée en France. Quel est l’apport déterminant de l’ostéopathie ? C’est du mieux-être ou un véritable gain thérapeutique ?

Cela dépend de là où on place la barre du gain thérapeutique. Des femmes ressentent des douleurs qui peuvent être assez vives voire incapacitantes. C’est-à-dire qu’elles ne peuvent plus aller travailler. Elles ont du mal à se déplacer, elles se réveillent la nuit parce que ces douleurs les empêchent de se tourner ou de dormir. On arrive finalement à avoir un gain thérapeutique effectivement puisqu’il y a des femmes qui peuvent travailler et qui peuvent faire des activités, faire du sport à côté, grâce à des séances d’ostéopathie plus ou moins suivies, ça dépend des femmes.

Aider bébé à gagner en mobilité

Manipuler une femme enceinte ou après son accouchement, manipuler un nourrisson, cela peut sembler très sensible. Vous ne travaillez pas sans une coordination étroite avec les médecins ?

Effectivement, c’est le but. Il y a toujours l’aspect médical qui est prioritaire. Nous, on est en parallèle. On travaille conjointement avec le corps médical, notamment les gynécologues et les pédiatres. Le but est d’avoir une prise en charge la meilleure possible, la plus globale, d’offrir aussi une sécurité aux jeunes parents, une sécurité médicale et paramédicale.

Dès qu’on décèle quelque chose, si ça n’a pas été vu par un gynécologue, un pédiatre, un médecin, notre but est alors de renvoyer (vers eux).  C’est aussi tout le but des études que l’on a suivies, d’être en capacité de déceler des choses qui ne dépendent pas du domaine médical. Et du coup, il y a aussi pas mal de pédiatres notamment, pour les enfants, pour les nourrissons, qui nous renvoient les patients parce qu’il y a besoin de manipuler pour développer la mobilité, permettre un meilleur développement de bébé en enlevant les petites restrictions qu’il peut y avoir au niveau de sa croissance.

Quand l’arrière du crâne de bébé est plat…

Pourquoi est-ce que les demandes d’intervention sur les nourrissons progressent-elles ? Est-ce parce que les parents sont stressés ? Et que faites-vous avec ces bébés qu’on imagine très fragiles ?

C’est fragile un bébé mais finalement pas si fragile que ça ! On a une approche très douce. On va regarder déjà d’une part sa mobilité générale, ses rotations de tête, ses rotations de bassin. Le but est justement d’enlever ces petites restrictions qui peuvent le gêner. Surtout, ça peut être gênant par exemple dans la mise en place de l’allaitement, des troubles de succion ou autre. De plus en plus de parents se tournent vers l’ostéopathie parce que cela apporte quelque chose à bébé.

La demande (des parents) est croissante, elle est liée notamment par exemple aux consignes de couchage. Aujourd’hui on couche les bébés sur le dos pour éviter la mort subite du nourrisson, et du coup ça va créer des contraintes notamment au niveau de la tête et potentiellement des méplats qui peuvent se transformer en plagiocéphalie. Donc le but est d’offrir une prise en charge globale. En ostéopathie on va travailler sur la mobilité générale de bébé pour lui permettre de développer notamment sa force musculaire afin d’éviter ce genre de souci. On travaille aussi sur les reflux gastro-oesophagiens, les RGO. C’est toujours très intéressant la prise en charge de nourrissons.

Que maman se sente mieux…

Avoir porté un enfant puis lui donner la vie constitue un bouleversement majeur pour le corps d’une femme. Quels sont les problèmes auxquels vous allez tenter de remédier ?

Dans le post-partum on peut retrouver des douleurs liées notamment à l’accouchement ou des douleurs parce que le corps s’est transformé. Il se réadapte à l’inverse de la grossesse. On va agir sur ce genre de cas. On va aussi être particulièrement attentif sur les cas de stress en post-partum. On parle beaucoup de baby blues dépression du post-partum. C’est un sujet vraiment d’actualité et dans la prise en charge on a un œil particulier sur ça. Parce que le stress provoqué par l’accouchement, et qui peut se développer pendant la grossesse, peut être lié à des douleurs que maman va ressentir et peut aussi entraver le développement du lien de la mère avec son enfant.

C’est toujours le même principe : on fait un état des lieux, que ce soit physique ou psychologique, de la patiente; ça nous permet de rediriger vers le corps médical si besoin, si on décèle des choses qui ne sont pas de notre ressort. Cela permet aussi de travailler sur maman pour qu’elle se sente mieux. C’est également un moment d’échange très important puisqu’en ostéopathie, la consultation va durer à peu près 45 minutes. On va pouvoir parler de ces contraintes. On va pouvoir essayer d’aider maman et on va surtout aussi parler de l’environnement à la maison, comment moduler cet espace pour que la vie de bébé soit la meilleure possible à la maison.

Refaire du sport, courir…

Est-ce que les mamans peuvent accomplir elles-mêmes des exercices leur permettant de regagner un état physique satisfaisant ? En sortant de votre cabinet par exemple, que leur conseillez vous de faire ?

Cela va se faire peut-être en deux temps. Il y a un premier temps pour se remettre de l’accouchement : est-ce que ça a été par voie basse ou par césarienne ? C’est quand même assez différent. Est-ce qu’il y a une déchirure au niveau du périnée ou pas ? Déjà un premier temps de récupération pour la maman. Et après, ça va dépendre de son ressenti personnel. Comme pendant la grossesse, il y a des mamans qui se sentent en forme pour faire un peu de sport, pour marcher, courir, et il y en a d’autres pour qui c’est plus compliqué, qui développent des douleurs ou des incapacités à se mouvoir facilement.

Dans un deuxième temps, il va y avoir aussi la rééducation du périnée qui va être extrêmement importante, faite par les kinés ou les sages-femmes, et qui va permettre de remobiliser le corps déjà, de retrouver une posture en dynamisant le périnée. Et nous on va accompagner la rééducation du périnée en travaillant sur l’équilibre global du corps et notamment en faisant un travail spécifique sur le bassin pour que la maman récupère au mieux. Et après c’est suivant son ressenti. Elle peut très rapidement reprendre de l’exercice physique.

Vous invitez les jeunes mamans à reprendre de l’activité physique assez rapidement ?

Oui, si elles se sentent bien évidemment. Le but n’est pas de les stresser ou de leur mettre un poids sur les épaules en disant « il faut faire du sport! ». C’est un ressenti de chacun. C’est un moment qui est un bouleversement pour les jeunes couples et les jeunes mamans. La première des choses c’est de se sentir bien, et de se sentir bien avec bébé. La place pour le corps va petit à petit se développer. Et il y a la place aussi pour la maman en elle-même. C’est pour ça qu’on voit souvent les mamans au bout d’un mois, un mois et demi, deux mois, le temps qu’elles prennent conscience qu’il faut qu’elles s’occupent aussi d’elles.

Le rôle du papa est fondamental

Eh oui ! Parce que les mamans sont des mamans mais ce sont aussi des femmes qui ont besoin de penser à elles…

C’est ça ! D’où l’importance aussi de l’accompagnement autour de maman, autour de maman et de bébé, l’importance de la présence du conjoint qui est là pour justement, de manière métaphorique, faire le nid et faire en sorte que maman n’ait à s’occuper que de bébé et développer son lien sans stress, sans problème autour. Ce qui pose aussi la question du congé de paternité, et de maternité aussi, qui est toujours très court même s’il a augmenté dernièrement, mais qui mériterait d’être plus long pour permettre à maman d’être sereine sur une durée qui lui permettrait de récupérer normalement.

Est-ce que ces actes sont pris en charge par l’Assurance Maladie, par les mutuelles ?

Non. Il n’y a pas de prise en charge par la Sécurité sociale. Par contre, il y a de plus en plus de mutuelles qui remboursent, soit en partie – 2, 3 ou 4 séances par an -, soit complètement quelques séances par an. Il est intéressant de voir qu’il y a des entreprises qui commencent à s’intéresser un peu au mieux-être des salariés et qui proposent de prendre en charge des séances d’ostéopathie. Petit à petit, on arrive à avoir une prise en charge plus importante des séances d’ostéopathie. Bien évidemment ça dépend toujours des moyens qu’on a. Si on a une bonne mutuelle, on va être en capacité d’avoir des remboursements qui sont plus importants. Mais en tout cas on va vers du mieux dans ce domaine.

Le handball professionnel a déterminé sa pratique

Thomas Nicolini, vous étiez handballeur professionnel. Vous avez joué notamment au plus haut niveau à Chambéry et à Strasbourg, et vous avez terminé votre carrière près de chez nous à Martigues. Ce parcours sportif de haut niveau a-t-il contribué à l’approche de votre métier ?

Complètement ! Que ce soit avec l’ostéopathie, la kinésithérapie, les médecins du sport, j’ai toujours été en contact avec ce milieu là. On a toujours un accompagnement très spécifique quand on est dans un parcours de haut niveau. Très jeune j’ai eu la chance de rencontrer une ostéopathe formidable qui m’a donné le goût de cette discipline, de cette pratique, de cette prise en charge un petit peu différente mais très importante. Dans ma pratique sportive ça m’a énormément aidé et notamment sur tout ce qui est gestion du corps, de la douleur mais aussi gestion du stress. Parfois il y a certaines contraintes qui s’appliquent, qui font qu’on ne se sent pas forcément bien et qui nous donnent des douleurs; ces pratiques nous permettent ensuite d’être mieux, d’aller mieux.

cet article vous a plu ?

Donnez nous votre avis

Average rating / 5. Vote count:

No votes so far! Be the first to rate this post.

Partagez vos commentaires.