Mal de dos : l’enfer de la hernie discale

Vous ressentez un engourdissement dans la jambe, un tiraillement typique de la sciatique, une douleur insupportable au bas du dos ? C'est peut-être la rupture d'un disque intervertébral qui compresse un nerf et peut aboutir à une paralysie des membres. Plus de 30.000 personnes sont opérées chaque année en France d'une hernie discale lombaire et des centaines de milliers d'autres souffrent. Le docteur Aymeric Faure, chirurgien du rachis à l'Institut Méditerranéen du Dos et à l'Hôpital Saint-Joseph à Marseille, livre ses conseils et prévient : attention au surpoids, à la sédentarité, mais aussi à la course à pied intensive et à certains métiers physiques. Les 30-50 ans sont particulièrement visés, les hommes (56%) plus que les femmes.

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Quand on dit que l’on souffre d’une hernie discale, de quoi s’agit-il précisément ?

Docteur Aymeric Faure : Pour bien comprendre, il faut rappeler quelques notions d’anatomie. Au niveau de la colonne vertébrale, on retrouve des vertèbres qui sont la structure osseuse et des disques qui jouent le rôle de stabilisateurs entre ces vertèbres. Au milieu de la colonne vertébrale se trouve le canal rachidien, dans lequel circulent les éléments neurologiques, des fibres nerveuses qu’on appelle « queues de cheval ». Elles quittent le canal rachidien sous la forme de racines, par des tunnels qu’on appelle foramen, au niveau des disques intervertébraux. Le disque est composé de deux structures : un noyau central (le nucléus) et une structure périphérique, un anneau fibreux autour. C’est l’usure de ce disque, des fibres de cet anneau, qui conduit à la hernie discale qui est une extrusion du nucléus à travers les fibres de cet anneau qui s’abîment.

Quelles sont les causes d’une hernie discale ?

C’est la dégénérescence du disque, le vieillissement des structures. L’âge est une cause de hernie discale. Les autres causes sont le surpoids qui va favoriser l’usure prématurée du disque en exacerbant les contraintes qu’il subit et les mauvaises postures répétées, les mouvements à risque comme soulever des poids, se pencher en avant lorsqu’on soulève des charges lourdes. Tout cela accentue la pression que subissent les disques et favorise leur usure. Et puis la sédentarité, le manque d’activité physique, s’associe à une diminution des muscles qui vont soutenir la colonne vertébrale et la protéger, et donc favoriser l’usure prématurée des disques intervertébraux et la survenue d’une hernie discale.

Oui à la course à pied, mais de manière progressive

Combien de personnes sont opérées chaque année et quelle est la moyenne d’âge ?

D’après les données nationales, on estime que 30.000 personnes ont été opérées d’une hernie discale en France (chiffres 2014). La tranche d’âge moyenne est entre 30 et 50 ans et on note une petite tendance à une fréquence plus élevée chez les hommes.

Des postures, des métiers ou des sports peuvent-ils favoriser la survenue d’une hernie discale ?

Concernant les métiers, les professions impliquant le port de charges lourdes, la manutention, augmentent le risque de survenue de pathologies lombaires d’une manière générale, et en particulier de hernie discale. D’ailleurs les sciatiques et les cruralgies entraînées par une hernie discale sont les seules pathologies rachidiennes reconnues et inscrites au tableau des maladies professionnelles. Concernant le sport, il n’y a pas un sport en particulier qui va provoquer une hernie discale. On entend souvent que la course à pied n’est pas recommandée, qu’elle fragilise les disques et peut entraîner des sciatiques. C’est partiellement vrai. Ce n’est pas le sport le plus recommandé, mais c’est mieux que rien. Il faut prendre en compte la globalité de l’état de santé du patient et tout est une question de dosage et de fractionnement de l’activité. L’entraînement doit être progressif, il faut gérer les distances, le dénivelé, et dans ces conditions la course à pied est tout à fait possible.

Remuscler le dos et la sangle abdominale permet d’éviter l’opération

Peut-on éviter l’intervention chirurgicale lorsque la hernie discale apparaît ?

Oui et c’est l’objectif principal que l’on se fixe. Pour cela, il faut prendre en charge les symptômes de manière précoce et par un travail de rééducation, dont les objectifs vont être un réentraînement musculaire de la sangle abdominale, des muscles érecteurs du rachis, et également d’étirement des muscles qui entourent le rachis et des muscles du bassin. On arrive en général à diminuer les contraintes sur le disque abîmé et à diminuer la symptômatologie de sciatique entraînée par la hernie discale.

En quoi consiste l’intervention chirurgicale ?

C’est un geste qui consiste à retirer le morceau de disque de la hernie discale tout en conservant le disque intervertébral du canal duquel elle provient.

Est-ce une intervention longue, complexe ?

Elle dure en moyenne 30 minutes, sous anesthésie générale. Le chirurgien accède au disque par une courte incision d’environ 3 centimètres, retire la hernie discale et les fragments de disque abîmés pour éviter qu’ultérieurement une nouvelle hernie discale se développe, tout en protégeant la racine, les structures neurologiques et éventuellement en complétant la libération de la racine par un geste de recalibrage, d’ouverture osseuse pour faciliter le passage de la racine.

Le patient remarche dès le 1er jour !

Comment se passent le post-opératoire et la rééducation ?

On encourage une mobilisation précoce. On demande au patient de se verticaliser dès le retour du bloc opératoire. Des traitements antalgiques sont prescrits, une infiltration est faite au moment de la chirurgie pour éviter les douleurs lors des premières heures post-opératoires. Il n’y a pas d’interdictions particulières en termes de positions. Très rapidement, il faut bouger. On va marcher dès le retour dans la chambre du patient. L’équipe paramédicale stimule le patient à se lever, à se rhabiller et à commencer à reprendre ses activités du quotidien.

Peut-on reprendre une vie totalement normale, notamment sur le plan sportif ?

Cela se fait en plusieurs phases. La reprise des activités du quotidien se fait de manière progressive, sur les 6 à 10 semaines qui suivent l’intervention. Pour l’activité sportive, il faut en général attendre le troisième mois.

Existe-t-il un risque de récidive ou de hernie sur un autre disque ?

Oui. On peut voir réapparaître une douleur de sciatique après la chirurgie qui peut correspondre soit à une nouvelle hernie discale sur le disque abîmé, soit à une hernie discale à un autre niveau. Dans ces cas-là, la prise en charge suit le même schéma. Seulement, si un geste chirurgical doit être à nouveau envisagé en cas de récidive au même niveau, il peut alors s’agir d’un geste de remplacement du disque intervertébral lésé.

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