Michel Montana nous a quittés

Ancien président du « Mondial La Marseillaise à pétanque », qu'il avait créé avec Charles Pasqua en 1962, Michel Montana vient de jouer sa dernière partie. Il avait 91 ans. Personnalité-phare de la vie locale, il avait su nouer de solides amitiés dans tous les milieux à Marseille, à Paris et dans le monde entier. Un voile de tristesse s'est abattu sur toute la ville

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Avec Jules Hugues, qui l’inventa en 1907 à La Ciotat, il est incontestablement l’homme qui a le plus œuvré pour faire connaître la pétanque aux quatre coins du monde. Avec la disparition de Michel Montana, dans la nuit de la Saint-Valentin, c’est un grand amoureux qui s’en va. Amoureux des boules, évidemment. Mais aussi amoureux de Marseille, « sa » ville, amoureux de Marie, son épouse de toujours, et amoureux comme personne de toutes les Marseillaises et de tous les Marseillais, qu’aucun homme politique n’a jamais réussi à connaître aussi bien – et en aussi grand nombre – que lui.

Ambassadeur officieux de Marseille

Car Michel Montana, c’était avant toute chose l’ambassadeur officieux de cette ville qu’il aimait tant et de ses habitants, aussi bien auprès des personnalités du showbiz que des grands de ce monde, à qui il s’adressait avec la même simplicité, la même empathie et le même aplomb qu’aux lecteurs de La Marseillaise, à qui il vendait le journal à l’arrière de sa voiture dans les années 1960.

Débuts dans la chanson

Né Albert Tordjmann en 1931 à Oran, dans une famille juive d’origine espagnole, il était arrivé à Marseille tout minot, quand son père décida de franchir la Méditerranée pour venir tenter sa chance en métropole. Cachée dans le Vaucluse pendant la guerre, la famille revint à Marseille à la Libération et c’est sur les planches des cabarets du Vieux-Port que Michel débuta sa carrière dans la chanson.

C’est d’ailleurs pour la scène qu’il se choisit ce nom, proche de celui de son voisin d’enfance qui venait de réussir à Paris : Ivo Livi, alias Yves Montand. Mais s’il se lie d’amitié avec quelques stars de l’époque, comme Fernand Reynaud ou Charles Aznavour, il ne connaît pas le succès escompté et finit par se lasser de cette vie de bohème, préférant rentrer à Marseille plutôt que continuer à végéter dans la capitale.

Du journal au Mondial

Au début des années 1960, il est donc embauché par La Marseillaise, le grand quotidien communiste de la ville, comme vendeur itinérant. Un métier qui lui permet de rencontrer Paul Ricard, l’inventeur du pastis moderne, et son chef des ventes de l’époque, un certain Charles Pasqua. Leurs divergences politiques n’empêchent pas les deux hommes de lancer une manifestation populaire, avec pour objectif de promouvoir aussi bien le journal de Michel Montana que l’apéritif anisé de Pasqua. La première édition de ce qui deviendra le « Mondial La Marseillaise à pétanque » est organisé en juillet 1962 au parc Borély. L’idée, c’est aussi da faire concurrence au plus grand concours bouliste alors organisé par le journal concurrent, Le Provençal, propriété du maire socialiste de Marseille, Gaston Defferre.

La mayonnaise met du temps à prendre, mais l’incroyable carnet d’adresse de Michel Montana va bientôt faire la différence. Après avoir convaincu Henri Salvador de quitter une fois par an la place des Lices de Saint-Tropez pour venir lancer le cochonnet au parc Borély, il finit par décider Yves Mourousi, alors présentateur vedette du journal de 13 heures sur TF1, de participer à son « Roland-Garros » des boules et à en parler à la télévision. Nous sommes alors au début des années 1980, et c’est le déclic. Ce qui n’était alors qu’un beau challenge régional devient le « Mondial » de la pétanque et des triplettes commencent d’arriver de tous les coins de la planète pour en découdre sur le mail.

Une figure capitale du Tout-Marseille

Quarante plus tard, ce concours reste le plus couru de l’année pour les joueurs amateurs et celui auquel il faut inscrire son nom au moins une fois si on joue en professionnel. C’est dire la tristesse qu’éprouvent aujourd’hui toutes celles et ceux qui ont un jour foulé les allées du parc Borély sous le soleil de juillet.

Mais ce ne sont pas seulement les boulistes qui pleurent. Peu connu du grand public, Michel Montana était en effet une figure capitale du Tout-Marseille. Négociateur redoutable et séducteur patenté, il a longtemps maintenu à flots « son » journal en signant de juteux contrats publicitaires avec les chefs d’entreprises à qui il claquait la bise et qu’il tutoyait, quelle que soit leur notoriété ou le montant de leur fortune. Les politiques de tous bords jalousaient aussi sa faconde inimitable, son élégance intellectuelle, son charisme et son entregent dans tous les milieux, à Marseille comme à Paris, une aura qu’il s’était construite au fil du temps par son implication, sa sincérité et sa bienveillance.

Adieu Michel, tout Marseille t’embrasse.

 

À voir : « Michel Montana, une histoire de Marseille » réalisé par Lionel Boisseau

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