Prostate : faisons sauter ce tabou qui tue !

C'est un coup de gueule des patients atteints par le cancer de la prostate qui a conclu hier à Marseille la campagne d'information conduite par MProvence. Solitude face à cette maladie pourtant fréquente, désarroi quand la sexualité est amoindrie, et la peur du qu'en-dira-t-on. C'est tout cela qu'il faut dépasser et les médecins en sont bien d'accord...

La prostate parlons-en !

« Quand on vit un cancer de la prostate, souvent on est seul. » Responsable en Provence de l’Association nationale des malades du cancer de la prostate (ANAMACaP), M. Delor appuie là où ça fait mal. Car à la lutte contre la maladie s’ajoute souvent le dysfonctionnement sexuel profond qu’entraînent les traitements. Pour parler clair, les érections deviennent impossibles sinon très molles. « C’est une maladie difficile à vivre avec sa ou son partenaire. »

L’impact des associations de patients

Certains parlent d’un état de « sidération » qui s’abat sur eux à l’annonce. Les associations de patients prennent alors tout leur sens car elles permettent d’exposer ses problèmes, d’être écouté, d’obtenir une information éclairée et des conseils, et d’évoquer les solutions médicales et/ou palliatives. Des solutions d’ailleurs fort bien présentées par le docteur Thomas Maubon, urologue à l’Institut Paoli-Calmettes, lors de la conférence publique « La prostate, parlons-en pour vous protéger ! » qui s’est déroulée ce jeudi soir à Marseille, au siège d’Aix-Marseille Université. « Nous ne sommes pas des magiciens, rappelle le chirurgien, mais on est là également pour aider les patients à prendre en charge les difficultés post-opératoires » qui vont durer plusieurs années.

Concentrés sur les soins à délivrer pour sauver, des médecins peuvent minimiser l’information sur les effets secondaires d’une chirurgie ou d’une radiothérapie qui risquent de dégrader fortement les nerfs érecteurs jouxtant la prostate à retirer ou à irradier pour neutraliser ce cancer qui tue plus de 8.000 hommes chaque année en France.

Récupération de l’érection

« On m’a parfaitement soigné à l’hôpital de La Conception (APHM) lors de la découverte de mon cancer en 2016 et tous les jours je remercie le ciel d’avoir été si bien opéré, car on m’a sauvé, explique Francis. Mais je ne pensais pas que les effets sur la sexualité seraient aussi importants. »

Le Pr Cyrille Bastide, urologue à l’Hôpital Nord (APHM), a rappelé que chaque année 20.000 prostatectomies (ablation de la glande) sont réalisées en France, dont 75% par chirurgie robotique. « Des progrès considérables ont été accomplis pour améliorer la continence urinaire, ainsi que pour la récupération de l’érection. »

On opère beaucoup moins depuis dix ans

C’est surtout en matière de continence urinaire que les gains paraissent le plus notable. « Plus de 95% des personnes sont continentes après un traitement, a assuré le Pr Gilles Karsenty, urologue à La Conception. Mais, c’est vrai, le problème, ce sont les conséquences sur la sexualité. »

Le développement de la surveillance active – sur les cancers jugés « indolents », non agressifs – a permis de réduire le nombre de traitements. Résultat, le patient continue à mener une vie normale tout en restant surveillé avec un dosage régulier du taux de PSA doublé d’un toucher rectal et d’une IRM voire de biopsies de prostate si nécessaire.

« Il y a dix ans, on traitait tous les patients de la même manière« , résume le Dr Géraldine Pignot, urologue à l’IPC. Désormais, c’est presque du sur-mesure. « Si la tumeur est strictement localisée à la prostate et de petite taille au toucher rectal, on va se contenter d’une surveillance. On évite l’engrenage « PSA – biopsie – traitement » qui aboutissait à du surdiagnostic et du surtraitement. » En résumé, la surveillance active c’est un contrôle du PSA par prise de sang tous les 3 à 6 mois, une IRM tous les 12 à 18 mois et une biopsie sous anesthésie entre 6 mois et un an, puis une réévaluation tous les 3 ans.

Docteur en conférence

Un vide psychologique sidéral

On a vu lors de cette conférence combien les traitements ont progressé, y compris pour les cancers métastasés. Le Dr Gwenaëlle Gravis, oncologue médicale à l’IPC, a déployé une batterie impressionnante de nouvelles molécules. Il est vrai que ce cancer représentant 25% de tous les cancers masculins – 1 homme sur 8 sera touché au cours de sa vie -, la recherche scientifique et l’industrie pharmaceutiques sont particulièrement actives.

« Il y a un vide psychologique sidéral souvent entre les médecins et les patients », confiait un participant à la conférence. Face à la détresse des patients qui déplorent de se retrouver seuls face aux conséquences de cette maladie qui reste un tabou dans notre société parce qu’elle touche à la sexualité des hommes, Géraldine Pignot a insisté : « Echanger avec d’autres patients est très important. Nous devons aussi lors des consultations leur proposer d’entrer en contact avec les associations. »

Risque de dècès diminué de 20%

Hier soir, tous, patients et médecins, se sont retrouvés sur un message commun adressé aux hommes à partir de 50 ans (voire dès 45 ans en cas d’antécédents familiaux ou si on est d’origine afro-antillaise) et résumé par le Pr Romain Boissier (CHU Conception) : « Il est recommandé de faire procéder à un toucher rectal et de faire doser son PSA une fois par an et jusqu’à 75 ans voire plus tard. » Une étude conduite sur 162.000 hommes âgés de 55 à 69 ans a montré que ce diagnostic précoce permet de diminuer de 20% le risque de mourir d’un cancer de prostate.

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