Aix-en-Provence : la foire aux santons s’ouvre par des festivités traditionnelles

« La foire aux santons d’Aix a été fondée le 4 décembre 1934 par mon grand-père Jean-Baptiste Fouque » rappelle Mireille Fouque.

art de vivre

Une fois de plus, la ville aux mille fontaines a vibré pour un sublime anachronisme : prêche en langue provençale, défilé sur le Cours Mirabeau en costume traditionnel au son du galoubet et du tambourin, bénédiction des santons, et danses folkloriques. Un processus unique, qui signe l’ouverture annuelle d’une foire aux santons sélective, composée d’artisans de haute volée. Tout un programme, qui est avant tout l’œuvre de passionnés, associations et santonniers, qui œuvrent toute l’année pour préserver une culture menacée.

Tout commence le dimanche 27 novembre à 10h, en l’Église Saint Jean-Baptiste du Faubourg, Cours Sextius : entre ses murs résonne l’écho d’une langue qui disparaît de la vie sociale, mais qui imprègne encore la mémoire et les rues de notre région. Hormis quelques homélies, le père Bernard Wauquiez, prêtre du diocèse d’Aix et d’Arles, dirige une messe entièrement en provençal, accompagné d’un chœur de chanteurs costumés, ainsi que d’un orchestre de tambourins et de galoubets, devant les fidèles et les curieux, ravis. « J’ai appris le provençal au lycée, et je m’en suis régalé » explique l’homme d’Église, qui assure « essayer d’honorer la tradition et la culture de notre région » en conduisant cette cérémonie.

Photo passo carriero Aix santonniers Photo – Thibault Marenghi

Des groupes qui font vivre la tradition

L’organisation de l’événement est l’œuvre de l’association aixoise « Lei Farandoulaire Sestian », créée en 1959. Ses membres, rejoints par ceux des « Balaire dóu Rèi Reinié », et des « Roudelet dei Mielo », tous vêtus de costumes d’époque, garnissent les bancs d’une Église bien remplie. On y croise même un sosie de l’illustre poète Frédéric Mistral…Chez les Sestian, la tradition est avant tout une histoire familiale, qui s’écrit sur 4 générations successives : « J’ai la chance d’avoir encore ma mère, moi, ma fille et mes petits-enfants, et il y a essentiellement 3 familles de représentées rien que chez les tout petits » détaille Annick Della Cuna, présidente du groupe. En effet, des anciens aux jeunes enfants qui s’égaillent, tous les âges sont représentés dans les travées de l’Église. Des familles réunies autour de la préservation de la langue, et de la culture, qui s’inscrit dans un calendrier immémorial : la bravade calendale en décembre, la marche des rois en janvier, les feux de la Saint-Jean en juin, etc.

Au sortir de la messe, le cortège se lance dans un « passo carriero », un défilé sur le Cours Mirabeau, où les chalets de Noël se sont installés. Les bannières aux couleurs sang et or de la Provence, les tenues traditionnelles et l’orchestre font leur effet sur la population aixoise, qui lui réserve un excellent accueil. La procession s’arrête ensuite à l’Esplanade Cézanne, entre la Rotonde et les Allées provençales, où se tient la foire aux santons. Place désormais à la seconde partie de l’événement, organisée par la mairie d’Aix. Après la bénédiction des santonniers par le père Bernard Wauquiez, les discours d’officiels s’enchaînent. Puis les associations clôturent l’événement par des danses folkloriques, comme l’incontournable farandole, ou la danse des rubans.

Le Coup de Mistral (C) Création exclusive Santons Fouque – Photo Sophie Spiteri

Chez les santonniers, « c’est la qualité qui compte, pas la quantité »

La foire aux santons d’Aix, si réputée qu’elle soit, n’en est pas moins de taille modeste : 6 familles, et autant de stands, la composent. On y retrouve les Fouque, Cavasse, Girault, Richard, Mayans, et Jouve, patronymes emblématiques du santon aixois. Au micro, Arlette Olivier, élue municipale chargée de la culture provençale, donne son explication sur la raison de ce nombre réduit d’artisans. « Comme dirait ma petite-fille, c’est la qualité qui compte, pas la quantité ! » s’exclame-t-elle. Effectivement, la foire aux santons aixoise assume sa sélectivité.

Mireille Fouque, pilier de l’institution, nous l’explique : « ici nous fabriquons tout nous-mêmes, il n’y a pas de figurines en plastique et de santons venus d’ailleurs. Tout est entièrement fabriqué en Provence par des Provençaux ». Ce n’est pas seulement l’assemblage ou la finition qui sont réalisées dans notre région, mais l’entièreté de l’ouvrage, qui doit correspondre à un cahier des charges précis. Il n’est donc pas à la portée de tous de rejoindre le cercle très fermé des santonniers aixois, gardiens consciencieux de l’authenticité d’une tradition transmise de génération en génération. Certaines familles, notamment les Fouque et les Jouve, peuvent s’enorgueillir d’avoir obtenu la distinction de Meilleur ouvrier de France.

Mireille Fouque et le Coup de Mistral de la Maison FOUQUE © Santons FOUQUE – Corine Brisbois

De véritables dynasties, à la mémoire longue : « la foire aux santons d’Aix a été fondée le 4 décembre 1934 par mon grand-père Jean-Baptiste Fouque » rappelle Mireille Fouque. « Il y a à peu près 30 ans, l’association des Sestian est venue trouver mon père Paul, créateur du célèbre Coup de mistral [un santon de berger dont la cape flotte dans le vent, création originale et fierté de la maison Fouque, NDLR], pour lui proposer de lancer une messe des santonniers » explique-t-elle. C’est ainsi qu’est née cette tradition qui perdure toujours aujourd’hui, grâce au travail de tout un écosystème de passionnés. Pour encore longtemps, on l’espère.

 

Thibault Marenghi

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