André Pesce : « nous voulons redonner aux gens l’envie d’aller à la chasse »

La Fédération départementale des chasseurs des Alpes-de-Haute-Provence vient d'élire un nouveau président. André Pesce, maire du Fugeret, dans le Haut-Verdon, succède ainsi à Max Isoard, qui a tenu le poste plusieurs décennies. Avec son équipe, le nouvel élu entend renouer le dialogue avec les agriculteurs et donner un nouveau souffle à la fédération.

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Quelle est votre histoire avec la chasse ?

André Pesce :  » J’ai commencé à chasser à 16 ans et j’en ai 66 aujourd’hui. Je suis un homme très attaché à la terre et à la ruralité. J’attaque mon cinquième mandat de maire dans une petite commune très rurale. La chasse est totalement partie prenante de la ruralité et nous avons bâti notre projet pour apporter un souffle nouveau et une nouvelle réflexion sur le monde de la chasse.

Quelles sont les spécificités de la chasse dans les Alpes-de-Haute-Provence ?

 » Nous avons un département qui comprend une zone urbaine et une de zone de moyenne-haute montagne. Il y a vraiment plusieurs types de chasse : migratoire, lièvres, lapins, grand gibier, gibier de montagne… etc. Le département est assez atypique. Les territoires qui s’en rapprochent le plus ce sont les Hautes-Alpes et les Alpes-Maritimes.

Redonner aux gens l’envie d’aller à la chasse

Quelles sont vos ambitions pour la chasse bas-alpine ?

 » Nous voulons redonner aux gens l’envie d’aller à la chasse. Il semblerait qu’il y ait un petit rebond, notamment au niveau des femmes. Ce qui me réjouit, c’est bien que la chasse s’ouvre aux femmes. Il y en a eu 20 % à la dernière session de formation.

Pouvez-vous nous citer vos priorités pour ce début de mandat ?

 » Outre cette volonté de mieux faire connaître le monde de la chasse, nous voulons renouer avec le monde agricole. Le gros gibier cause beaucoup de problèmes, à l’échelle locale comme nationale. Il faut trouver des solutions, même si cela ne se fera pas en quelques jours. Il y a des dégâts dans tous les types cultures : prairies, fruitiers, semences, céréales… etc. Nous voulons organiser des réunions avec les agriculteurs pour trouver les solutions les plus adéquates, au moment où ils en ont besoin pour adapter leurs cultures. Nous allons essayer d’être présents à un maximum de réunions et d’événements, car nous voulons vraiment échanger et renouer le dialogue.

Un service dédié aux dégâts du gros gibier

Quels sont les services que la Fédération peut rendre aux agriculteurs ?

 » Nous avons un service plus ou moins dédié aux dégâts de gros gibier. Les agriculteurs viennent y déclarer leurs sinistres ; nos estimateurs se rendent ensuite sur le terrain pour constater les dégâts et les chiffrer. Nous sommes responsables de l’indemnisation de ces dégâts et le montant de l’indemnisation est déterminé par la Commission départementale de la chasse et de la faune sauvage (CDCFS), en fonction des cours. Au sein de celle-ci, il y a plusieurs représentants du monde agricole et notamment des syndicats. Nous aidons également les agriculteurs à protéger leur culture en prenant en charge 50 % du coût des systèmes de protection. Si cela ne suffit pas, l’administration peut demander des tirs. Si la pression est trop forte sur une zone, des battues peuvent aussi être organisées sous la conduite des lieutenants de louveterie. Nous pouvons intervenir sur tous les animaux qui sont considérés comme nuisibles. Il suffit à l’agriculteur de nous appeler, de remplir une fiche, puis nous alertons les piégeurs qui déclenchent le piégeage. Nous comptons d’ailleurs sur les agriculteurs pour nous faire remonter les informations, car cela est précieux. Nous voulons véritablement travailler en harmonie avec eux pour construire quelque chose d’efficace et de cohérent.

Montrer ce qu’est vraiment la chasse

Comment vivez-vous l’hostilité ambiante à l’égard des chasseurs ?

 » Il faut bien comprendre qu’une espèce, il faut la réguler, sinon, cela crée un déséquilibre. Nous voulons montrer ce qu’est vraiment la chasse, que les chasseurs font partie de ceux qui entretiennent les milieux, les gardent ouverts, s’occupent des chemins, créent des points d’eau… etc. Nous sommes présents toute l’année sur le terrain, pas que pendant les périodes de chasse. Nous sommes les sentinelles de la biodiversité. En France, nous reversons 2,9 millions d’euros à la nature et à la biodiversité. Ce n’est quand même pas négligeable. Si nous pouvons indemniser les agriculteurs, c’est grâce à ce que les chasseurs versent à la fédération. J’aime rappeler que la chasse est liée à l’humanité, qu’on le veuille ou non. Il y a des problèmes à tous les niveaux de la société, mais nous n’avons pas à subir ce que nous subissons de la part des médias, car la chasse a toute sa place dans la société. On ne parle pas des chasseurs qui sont dans le partage et qui offrent, par exemple, le gibier à des associations caritatives ou à leur village. La chasse ne se résume pas à tuer, c’est avant tout vivre et cohabiter avec la nature.

Une commission entre les chasseurs et la chambre d’agriculture

Dans le département quelles sont les zones agricoles qui pâtissent le plus de la présence de gibiers ?

 » On peut délimiter une zone qui part de Digne, au sud du département, où il y a énormément de cultures à forte valeur ajoutée, avec des contrats de semences qui sont durs à indemniser. D’ailleurs, nous allons mettre en place une commission avec la chambre d’agriculture qui regroupera les semenciers et les multiplicateurs pour installer des clôtures avant les semis. Ce système n’existait pas encore chez nous et nous avons vraiment la volonté de travailler sur cette problématique. Avec le temps, un petit fossé s’est créé entre les agriculteurs et nous, et nous aimerions vraiment le combler.

Concernant le loup, quelle est votre marge de manœuvre ?

 » Aucune ! Nous sommes complètement laissés de côté. Avant, nous pouvions faire des tirs de défense simples. Maintenant, seuls les louvetiers en ont le droit. Je me rappelle que la préfète Patricia Willaert avait donné la possibilité aux chasseurs de participer et de faire des prélèvements, mais cela a été abandonné. Peut-être se sont-ils aperçu que c’était un moyen de régulation trop efficace (rires).

Arrivez-vous à fédérer des jeunes ?

 » Oui, il y en a de plus en plus et comme je vous le disais, de plus en plus de femmes. Nous remarquons qu’il y a un engouement pour la chasse à l’arc, peut-être dans un souci de renouer le contact avec la nature et de pouvoir jouir d’une plus grande proximité avec l’animal, même si l’acte final reste le même. »

Alexandra Gelber

Espace Alpin une
L’Espace Alpin est le journal agricole et rural des Alpes-de-Haute-Provence et des Hautes-Alpes. Ce journal bimensuel est disponible sur abonnement sur lespace-alpin.fr

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