Le Département des Alpes-de-Haute-Provence veut réintégrer la sphère agricole

Éliane Barreille, ancienne maire de Malijai, le confesse : à l’origine l’agriculture n’était pas son sujet de prédilection. Elle était totalement novice sur ces questions qu’elle a appris à aimer au cours de son mandat régional. En charge notamment de l’élevage et du pastoralisme, elle a pris ces problématiques à bras le corps durant sa vice-présidence et il était naturel, pour elle, de poursuivre dans cette voie quand elle a pris la tête du Département. Depuis sa prise de fonction, elle ne cesse de clamer que le Département est de retour dans tous les domaines y compris l’agriculture. D’ailleurs, elle confie, avec malice, que ce n’est certainement pas un hasard si sa majorité compte cinq agriculteurs.

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Lorsque vous étiez élue à la Région vous aviez une délégation à forte connotation agricole était-ce à votre demande ?

Éliane Barreille : Pas du tout (rires). Je pense qu’on me l’a confiée parce que j’étais un peu la rurale de l’étape. Je me suis d’ailleurs demandé par quel bout j’allais prendre ces sujets. Mais, j’ai eu la chance d’avoir de très bons formateurs en la personne d’éleveurs qui sont, depuis, devenus des amis. J’ai vraiment appris à apprécier ces thématiques, j’ai rencontré des gens authentiques qui aimaient et étaient fiers de leur métier. J’ai eu l’opportunité de travailler sur des sujets très variés : la Pac, les parcs régionaux, les contrats rivières, la prédation, les problématiques environnementales, l’hydraulique, etc. L’agriculture est un monde encore un peu à part qu’il faut préserver.

“ Il faut préserver l’agriculture au titre de l’environnement et non l’inverse.”

Pourquoi avoir choisi de briguer un mandat départemental et de ne pas vous représenter à la Région ?

J’ai pris la décision de me lancer un peu au dernier moment. Je me suis dit que j’avais peut-être quelque chose de nouveau à apporter. Mon mandat régional m’avait permis de naviguer dans tous les départements et de voir ce qui marchait et ne marchait pas ailleurs. Et, notamment sur les questions agricoles, quand on travaille dans des départements très branchés agriculture comme le Vaucluse et les Hautes-Alpes on se demande pourquoi chez nous, ce n’est pas pareil.

Vous avez tout de suite affirmé votre volonté de réinvestir un certain nombre de dossiers que vos prédécesseurs avaient laissé de côté, dont l’agriculture, quelle était la situation et comment comptez-vous y remédier ?

Sous le prétexte de la loi NOTRe le secteur avait été un peu abandonné par le Département qui, en grande partie, se contentait de subventionner le laboratoire vétérinaire. Nous avons une convention avec la Région que nous allons rapidement revoir pour se laisser des marges de manœuvre. En tant que vice-présidente j’avais participé à la signature de ces conventions et nous avions laissé volontairement la porte ouverte pour que les départements puissent agir au niveau de l’agriculture. Il suffit de voir ce que font les Hautes-Alpes. Depuis notre arrivée nous travaillons en étroite collaboration avec la chambre d’agriculture.

Jean-Michel Tron, mon vice-président à l’agriculture a pour mission de mettre en place avec elle les objectifs majeurs qu’elle souhaite mettre en avant et que nous pourrons financer pour bâtir une véritable stratégie en faveur de l’agriculture. Nous ne savons pas encore jusqu’à quel niveau nous allons aller mais il est très clair que nous allons renforcer notre action sur le secteur agricole et que nous savons qu’il faut y consacrer plus d’argent. Nous allons également nous rapprocher du Cerpam sur les problématiques d’élevage et de pastoralisme car le Département a été trop longtemps absent.

« Avec le changement climatique nous devons nous saisir de ces questions et ne pas rester en dehors de ces sujets »

Quels sont les grands sujets sur lesquels le Département va se pencher dans les prochains mois ?

Nous voulons valoriser les circuits courts et aller au-delà de ce qui se fait déjà dans les collèges, il faut que nous soyons plus incitatifs et, là encore, nous travaillons avec la chambre d’agriculture sur le sujet. Nous avons des filières ovines et bovines qui ont réussi à s’imposer à l’échelle régionale en approvisionnant 18 lycées en plus des collèges et nous devons être présents à leurs côtés. Autre grande problématique sur laquelle le Département doit intervenir : l’hydraulique. Avec le changement climatique nous devons nous saisir de ces questions et ne pas rester en dehors de ces sujets. Nous serons là sur les gros projets structurants comme sur le plateau de Valensole en complément de la Société du canal de Provence ou des ASA sur d’autres projets. Mais nous ne pourrons pas aller partout. Nous devons également nous intéresser davantage aux pratiques environnementales, l’agriculture ne doit pas être vue uniquement sous l’aspect nourricier. Il faut préserver l’agriculture au titre de l’environnement et non l’inverse.

Il y a un secteur en lien avec l’agriculture qui, à mon sens, a totalement été oublié : c’est la forêt, avec deux entrées : le sylvopastoralisme et toute la problématique du bois. Cette filière doit se développer et je vais bientôt recevoir les communes forestières. C’est un enjeu important avec une activité économique intense. Les difficultés de l’usine de Tarascon ont fait toucher du doigt l’importance de cette filière dans les deux départements alpins. On a beaucoup de forestiers et d’emplois qui en dépendent. Nous devons travailler sur une filière de bois de construction, on n’exploite pas nos forêts au mieux.

« À chaque fois que j’allais au Salon de l’agriculture et que je voyais tous les départements de la Région sauf nous, j’avais un petit pincement au cœur. »

L’une de vos premières annonces concernant l’agriculture lors de votre prise de fonction a été la présence des Alpes-de-Haute-Provence au Salon international de l’agriculture (SIA) de Paris, pourquoi ?

Nous étions le seul département de la région à ne pas y être. À chaque fois que j’y allais dans le cadre de mon mandat régional j’avais un petit pincement au cœur car c’est une vitrine exceptionnelle et nous avons tous les atouts pour y briller au même titre que les autres. Il m’a donc paru normal et évident que ce soit l’une de nos premières actions en faveur de nos agriculteurs. Nous espérons vraiment qu’il va pouvoir se tenir et nous travaillons en ce sens dans l’attente de la décision finale qui devrait intervenir dans les jours à venir.

Qu’est-il prévu lors de cette semaine ?

Nous aurons un stand de 75 m² au sein du pavillon de la région Sud Paca. Il y aura des animations organisées par les agriculteurs eux-mêmes et nous espérons qu’il pourra y avoir des dégustations sinon cela risque de perdre un peu de son attrait. Toutes les filières seront représentées, cependant, nous avons choisi de mettre l’accent sur la lavande qui revêt à la fois des enjeux politiques et économiques importants pour notre territoire. Nous préparons ce salon avec la chambre d’agriculture, l’Agence de développement mais aussi le Crieppam et les agriculteurs. Il ne faut pas oublier que le SIA ne draine pas que des adeptes de l’agriculture mais également des touristes potentiels.

Alexandra Gelber

L’Espace Alpin est le journal agricole et rural des Alpes-de-Haute-Provence et des Hautes-Alpes. Ce journal bimensuel est disponible sur abonnement sur lespace-alpin.

 

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