Un abattoir mobile en projet dans le Luberon

Des éleveurs caprins et ovins viennent de s'allier pour mettre sur pied une unité d'abattage itinérante sur le territoire. Pour de nombreux éleveurs de petits ruminants, un abattoir mobile répond à une problématique très épineuse, aussi bien pour des questions pratiques, économiques qu’éthiques.

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Tout a commencé dans les années 2016-2017, quand des chevriers du sud du Luberon qui avaient du mal à valoriser leurs chevreaux en circuits courts ont commencé à réfléchir à la manière d’abattre leurs animaux pour pallier cette difficulté. De leur réflexion est née le projet de cet abattoir mobile. En 2019, l’idée a été reprise par un groupe d’une dizaine d’éleveurs qui se sont regroupés dans une association, « L’abattoir mobile du Luberon ».

Abattoir mobile, un dispositif précédemment interdit

Longtemps interdit en France, ce type d’unités d’abattage est dorénavant aidé dans le cadre des Projets alimentaires territoriaux (PAT) et de la loi Egalim.  Conçu pour tenir tout entier dans un semi-remorque, l’abattoir du Luberon permet aux professionnels d’effectuer toutes les étapes de l’abattage sur place. C’est-à-dire sur les aires de stationnement déterminées à l’avance, toujours dans l’espace public. c’est là que les éleveurs amènent leurs bêtes et les récupèrent après abattage.

Les placettes sur lesquelles doit stationner l’abattoir mobile seront agréées par l’Union européenne et devront respecter un certain nombre de critères. Selon l’association, l’idéal serait de disposer de trois placettes dans tout le Luberon, sur des  emplacements qui restent à déterminer. Des études sont en cours autour d’Apt, Cadenet et sur la Communauté de communes de Forcalquier. D’autres projets du même type sont en cours d’étude en France, mais aucun n’est encore opérationnel.

Un abattoir mobile pour une agriculture plus vertueuse

L’unité luberonnaise sera créée et gérée directement par les agriculteurs sous forme de coopérative ou de Cuma. Ce sont également eux qui s’occuperont de la chaîne d’abattage. Ils se sont d’ailleurs déjà rendus dans d’autres départements, afin de visiter des abattoirs et voir les enseignements à en tirer pour leur projet. Dans cette perspective, ils ont même lancé une opération de financement participatif sur la plateforme Miimosa, afin de réunir des fonds pour embaucher un chargé de projet qui les aidera à faire aboutir leur idée. Ils bénéficient également de l’appui technique du parc naturel régional du Luberon.

Soutenus financièrement par la Fondation de France dans un premier temps, ils ont consacré ces fonds à la mise en forme du projet et à l’organisation des réunions préparatoires. durant tout le processus, ils ont bénéficié des conseils experts d’un ancien directeur d’abattoir.

Actuellement, le conseil d’administration regroupe une vingtaine d’éleveurs du sud du Luberon. L’objectif est de réunir une quinzaine de producteurs par placette et de traiter environ 1500 bêtes par an sur chacune d’elles. Quatre éleveurs seront nécessaires à chaque fois pour assurer la gestion. Chaque placette disposera d’un bâtiment avec une chambre froide, de vestiaires et d’un bureau pour accueillir les services vétérinaires.

Mary André et Florian Jean, tous deux éleveurs à Pierrerue, sont deux des chevilles ouvrières du projet. Ce qui les a motivés à rejoindre le projet, c’est leur envie d’aller vers une agriculture plus vertueuse, d’accroître le bien-être animal et leur volonté d’accompagner leurs bêtes sur le durée.

Le bien-être animal, une priorité

« Le but n’est pas de faire de la concurrence aux autres abattoirs, mais d’être complémentaires, explique Florian Jean. Nous savons par exemple que Digne est déjà obligé de refuser des gens et dans le Var ou le sud du Luberon, il n’y a pas d’abattoir du tout. » Les éleveurs espèrent que l’abattoir mobile sera opérationnel fin 2023, si tout se déroule comme prévu. Parmi les obligations prévues dans la future charte, on notera que 100 % des animaux tués devront être nés sur les exploitations; que celles-ci devront avoir adopté un système pastoral et pratiquer une agriculture extensive, en outre, les éleveurs devront obligatoirement accompagner leurs bêtes jusqu’à l’abattage.

« L’idée est de faire ces travaux en communauté pour absorber la difficulté de la tâche, confie Mary André. Ce système d’abattage permet vraiment de limiter le stress des bêtes, et de l’éleveur, d’accompagner les bêtes de bout en bout et de réduire le temps de transport. Car, encore une fois, notre préoccupation principale, c’est le bien-être animal. »

Au delà des questions éthiques, ce projet devrait permettre de développer une filière de viande locale commercialisée autant que possible en la vente directe, afin de soutenir les unités de production familiales et de faciliter leur maintien sur le territoire, tout en répondant à la demande des consommateurs, de plus en plus friands de produits locaux à la traçabilité irréprochable

Alexandra Gelber

Espace Alpin 412
L’Espace Alpin est le journal agricole et rural des Alpes-de-Haute-Provence et des Hautes-Alpes. Ce journal bimensuel est disponible sur abonnement sur lespace-alpin.fr

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